Rio Loco

Cinq jours de musique festive dans une Europe et un monde à réinventer.

 

La Prairie des Filtres va vibrer aux sons méditerranéens et danser aux rythmes intenses d’une musicalité riche et plurielle ralliant des horizons communs. Pour ses 29 ans, RIO LOCO s’installe à Toulouse du 12 au 16 juin comme pour célébrer l’arrivée du printemps et l’accent de la cité gasconne si chère au cœur du chanteur toulousain, Claude Nougaro, avec son « torrent de cailloux » et son « Espagne qui pousse un peu sa corne ». Vingt ans après, un voyage sans retour de celui qui fut à l’initiative de ce festival de musique populaire en bord de Garonne, à la Prairie des Filtres, dans le quartier Saint-Cyprien.

Cette année, Odyssea, c’est un clin d’œil au retour d’Ulysse à Ithaque après maintes péripéties d’un long périple. « Un voyage entre exil et liberté, entre les deux rives de la mer Méditerranée », selon son directeur Fabien Lherisson. Toujours d’après celui qui est également le directeur du Métronum1 : « Du nouveau flamenco aux divas espagnoles, orientales et tsiganes, de la vibrante scène turque aux chants contemporains corses et grecs, des mélodies envoûtantes d’Afrique-du-Nord à l’incontournable rap marseillais, Odyssea promet une expérience épique et unique à découvrir ».

 

Les scènes du partage et de l’échange

 

Quelques moments forts de ces rencontres musicales avec dès l’ouverture : Cocanha « Voix et corps à ciel ouvert ». Le duo des toulousaines Lila Fraysse et Carolile Dufau glane dans le répertoire occitan et réinvente les chansons populaires sous un regard neuf. Ou encore le Cri du Caire et Erik Truffaz « Au carrefour des âmes ». Le chant soufi, saisissant, du poète et slameur égyptien Addullah Miniawy porte les espoirs des jeunes et moins jeunes révolutionnaires face à l’oppression d’un pouvoir politique qui enferme et torture toute une génération aspirant au pain et à la liberté.

Le lendemain, TIF (Toufik Bouhraoua, né à Alger) chante l’exil et son arrivée en France. Le rappeur invite sur la scène trois artistes franco-algériens : Rim’k, Djam qui marie ses origines algéroises à la musique andalouse, au reggae ou au groove, et Flenn.

« By The Sket » est la rencontre entre Alima Hamel, chanteuse-musicienne-comédienne et Vincent Ferrand, contrebassiste. Alima raconte l’histoire des femmes de sa famille. Une histoire douloureuse pour celles qui ont traversé la décennie noire en Algérie et connu l’émigration. Dans les pas de Rosalía, Queralt Lahoz, est l’une des sensations musicales flamenca de la scène espagnole. La jeune femme peut aussi bien interpréter un boléro classique qu’un rap de la tradition la plus pure des années 90. Sa musique mélange sonorités latines et urbaines. Née dans un quartier de migrations andalouses (sa famille est originaire de Granada) dans la banlieue de Barcelone, l’artiste puise son inspiration dans ce milieu et dans les femmes qui l’entourent.

Et pour finir en beauté créative, les frères Mouss et Hakim (Origines contrôlées) regardent « Des deux côtés de la mer ». « La mélodie, c’est comme la mer, comme un fleuve. Comme l’eau, elle est un bien commun. Elle prend sa source dans le patrimoine et se jette dans l’universel », peut-on lire dans le dossier de presse. Soirée exceptionnelle, donc, avec Les Héritières, un hommage aux trois chanteuses et petites sœurs de la grande Cheikha Rimitti, une des pionnières du raï algérien, femme libre et sans tabou, la musicienne incarne aux yeux des enfants de l’immigration un esprit de révolte. En compagnie de Karimouche, dont la voix frondeuse navigue entre poésie, chronique sociale et autodérision, Lili Lekmouli, danseuse de flamenco toulousaine et Tanina Cheriet, fille de l’immense chanteur et poète kabyle, Idir, dont le chant nous a longtemps bouleversé.e.s et continue de nous émouvoir.

Piedad Belmonte

 

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Notes:

  1. Implanté depuis 2014 dans le quartier de Borderouge, au nord de Toulouse, le Métronum est une salle de concert dédié aux musiques actuelles.
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Passée par L'Huma, et à la Marseillaise, j'ai appris le métier de journaliste dans la pratique du terrain, au contact des gens et des “anciens” journalistes. Issue d'une famille immigrée et ouvrière, habitante d'un quartier populaire de Toulouse, j'ai su dès 18 ans que je voulais donner la parole aux sans, écrire sur la réalité de nos vies, sur la réalité du monde, les injustices et les solidarités. Le Parler juste, le Dire honnête sont mon chemin