Après la large victoire du Rassemblement national aux élections européennes, Emmanuel Macron a décidé de convoquer des élections législatives anticipées.


 

Après la défaite totale de son camp aux élections européennes, le 9 juin, le chef de l’État a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale, chambre basse du Parlement français, et la convocation de nouvelles élections législatives, prévues pour les 30 juin et 7 juillet.

 

Qu’est-ce que la dissolution de l’Assemblée nationale ?

Cette possibilité est prévue par l’article 12 de la Constitution française. Le chef de l’État met ainsi fin de manière anticipée au mandat des députés de l’Assemblée nationale. Concrètement, les législatives de 2027 sont avancées à 2024.

La dissolution est une arme législative pensée pour permettre au président de la République de sortir la France d’une crise institutionnelle, par exemple lors d’une incompatibilité entre la majorité présidentielle et la majorité parlementaire. Il peut également servir de référendum déguisé, pour vérifier la confiance des électeurs à son égard.

 

Dans quelles conditions peut-elle être prononcée ?

L’article 12 de la Constitution donne assez peu de contraintes. Il n’en existe que trois : la personne qui peut le faire, le timing de la dissolution, et la procédure à suivre.

Qui ? Seul le président de la République peut dissoudre l’Assemblée nationale.

Quand ? Il doit s’être écoulé au moins un an entre les précédentes élections législatives et la dissolution.

Comment ? Le président doit consulter le Premier ministre et les présidents des assemblées avant de la prononcer.

 

Quelle est la suite ?

Des élections législatives anticipées sont organisées, sous le même format que des élections législatives classiques, sous forme de scrutin majoritaire à deux tours.

Le scrutin doit avoir lieu entre 20 et 40 jours après la prononciation de la dissolution de l’Assemblée nationale — soit, en l’espèce, entre le 29 juin et le 19 juillet 2024. Le premier tour est attendu dimanche 30 juin, et le second, le 7 juillet.

 

Que deviennent les travaux de l’Assemblée nationale qui étaient en cours ?

Les projets législatifs en cours, comme le projet de loi sur la fin de vie, sont purement et simplement suspendus.

Ils peuvent être repris sous la mandature suivante à condition que le gouvernement les présente à la nouvelle Assemblée. Ils repartent alors de zéro dans la navette parlementaire.

 

Quels sont les précédents historiques ?

Il en existe cinq.

  • En 1962, Charles de Gaulle dissout l’Assemblée après qu’une motion de censure a renversé le Premier ministre, Georges Pompidou. Les députés gaullistes en sortirent gagnants, avec 32 % des voix et une majorité absolue de 230 sièges, réinstaurant leur légitimité.
  • En 1968, Charles de Gaulle fait appel une seconde fois à l’article 12 de la Constitution, après la crise de Mai 1968, une manière de répondre au mécontentement exprimé dans la rue par le plébiscite des urnes : la majorité présidentielle remporte largement ces élections anticipées, avec 46 % des suffrages.
  • En 1981, sitôt élu, le socialiste François Mitterrand dissout le Parlement afin de s’appuyer sur une majorité à sa main, alors que l’Assemblée est alors majoritairement à droite. Le calcul est gagnant : la majorité présidentielle remporte 54,37 % des suffrages et devient de loin la première force du Palais-Bourbon avec 333 sièges.
  • En 1988, François Mitterrand, qui vient d’être réélu, décide de convoquer des élections anticipées pour mettre fin à la cohabitation entamée en 1986. Face à une droite plus puissante que sept ans auparavant, il introduit une dose de proportionnelle, afin de diviser l’opposition. La majorité présidentielle remporte une courte majorité relative, avec 46,66 % des voix et 277 sièges, contre 270 pour la droite gaulliste.
  • En 1997, deux ans après son élection, Jacques Chirac prend le pari de renforcer sa majorité pour gouverner avec les coudées plus franches. Il dissout l’Assemblée, mais la coalition de gauche déjoue les pronostics et l’emporte, avec notamment 38,05 % des voix et 255 sièges pour le Parti socialiste. L’élection aboutit à une nouvelle cohabitation, avec la nomination de Lionel Jospin à Matignon.

Quelles seront les conséquences institutionnelles ?

En convoquant des élections législatives en 2024, à trois ans des présidentielles, Emmanuel Macron désynchronise les élections législatives des élections présidentielles. Depuis le passage au quinquennat et l’inversion du calendrier en 2002, celles-ci s’étaient toujours succédé, chaque législative confirmant le résultat de la présidentielle qui l’avait précédée quelques semaines plus tôt.

Ce calendrier, adopté lorsque Jacques Chirac était président, avait enclenché la présidentialisation du régime et la disparition, de fait, des cohabitations telles que la France les avait connues en 1986-1988 (Jacques Chirac sous François Mitterrand), en 1993-1995 (Édouard Balladur sous François Mitterrand) et en 1997-2002 (Lionel Jospin sous Jacques Chirac).

Les deux élections pourraient à nouveau être réalignées si, et seulement si, le prochain vainqueur de l’élection présidentielle, en 2027, décidait à son tour de dissoudre l’Assemblée nationale, à peine arrivé à l’Élysée.

 

Avec les sources du journal Le Monde (Les Décodeurs)

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