Présenté par le gouvernement comme une « boîte à outils », le texte vise à prolonger au-delà du 15 novembre la possibilité de recourir au pass sanitaire et toute une batterie de mesures pour freiner l’épidémie de Covid-19, dans le cadre d’un régime post-crise jusqu’au 31 juillet 2022.


 

Adopté en première lecture la semaine dernière à l’Assemblée nationale à l’issue de débats agités, le texte arrive jeudi dans l’hémicycle du Sénat qui, s’agissant de mesures privatives de libertés, fait du contrôle régulier par le Parlement une condition indispensable.

« Il n’est pas question de donner un blanc-seing jusqu’au 31 juillet 2022, il faut que ça soit sous le contrôle du Parlement », insiste le président LR du Sénat Gérard Larcher.

Les sénateurs ont largement réécrit le texte en commission et ont adopté la proposition du rapporteur Philippe Bas (LR) de prolonger les dispositions jusqu’au 28 février seulement. À charge au gouvernement de revenir devant le Parlement pour poursuivre au-delà, si la situation sanitaire l’exigeait.

Le rapporteur considère que « trois mois et demi ça va, huit mois et demi c’est trop ».

Un état d’esprit globalement partagé par les sénateurs.

« Le gouvernement nous dit on va enjamber les présidentielles et on repassera devant le Parlement. Non. On donne au gouvernement un certain nombre de pouvoirs sur nos libertés, on veut le contrôle du Parlement », affirme le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau.

« C’est un marqueur du Sénat », renchérit le président du groupe centriste, Hervé Marseille, qui souligne les inconnues de l’après élections : « quel président ? quels ministres ? quelle majorité ? ».

À gauche, le patron des sénateurs PS Patrick Kanner est sur la même ligne sur ce point, reprochant à l’exécutif « sa logique de concentration du pouvoir ».

 

Secret médical

 

En revanche, la question du pass sanitaire fait débat. Le rapporteur propose qu’on ne puisse plus y avoir recours dans les départements qui auront, au 15 novembre, plus de 75 % de leur population vaccinée (soit à peu près 90 % des plus de 12 ans).

Cette proposition « a été ressentie de façon nuancée par la majorité sénatoriale », selon M. Marseille. La majorité compte dans ses rangs des « anti-pass » affirmés, tel le centriste Loïc Hervé.

À gauche, les socialistes proposeront d’aller plus loin, estimant que le pass sanitaire « n’a plus de raison d’être en métropole », selon Marie-Pierre de La Gontrie.

Le ministre de la Santé Olivier Véran estime lui ne pas avoir « suffisamment de recul à ce stade pour pouvoir se priver d’un outil qui est fonctionnel, qui est très bien accepté par les gens. Ce qui ne veut pas dire qu’on veut le maintenir dans la durée », a-t-il déclaré mardi devant les sénateurs.

« La question n’est pas de savoir ce que pense tel ou tel, mais est-ce qu’aujourd’hui nous maîtrisons totalement le virus. La réponse est non », a taclé mercredi Christophe Castaner, le patron des députés En Marche, sur Sud Radio.

Comme partout en Europe, l’épidémie connaît un rebond en France, à l’entrée dans la saison froide. Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a confirmé mercredi « une reprise légère mais sensible », avec 5 400 cas détectés par jour en moyenne, mais a estimé que la France peut espérer « un hiver relativement serein » grâce à son taux de vaccination.

Le Sénat devrait par ailleurs supprimer la disposition controversée introduite par voie d’amendement à l’Assemblée nationale pour permettre la connaissance du statut vaccinal des élèves par les directeurs d’écoles ou les chefs d’établissement du second degré.

Pour M. Bas, cette « nouvelle dérogation au secret médical est susceptible de préfigurer la mise en place d’un pass sanitaire pour les élèves ».

Une fois le texte voté au Sénat, avec ses modifications, députés et sénateurs tenteront de s’accorder sur une version commune en commission mixte paritaire. En cas d’échec, l’Assemblée nationale aura le dernier mot.

Avec AFP