La Marseillaise en commun suit avec intérêt le travail de l’association Patrick Geddes France. L’oeuvre de Geddes, et son héritage dans le monde (un des objets à découvrir à l’occasion du Colloque de Montpellier) offrent des éléments de réponses aux aspirations de collectifs issus de l’économie collaborative et de l’écologie. L’ancêtre des jardins partagés, n’aurait-il pas exploré avant l’heure l’habitat participatif ? À la faveur du colloque Geddes un pionnier de l’écologie urbaine, nous est donnée l’occasion de revisiter les notions de « communauté », « ressource » et « gouvernance partagée » qui fondent de possibles renaissances. De ce point de vue, à travers les témoignages proposés par les participants, on pourra trouver matière à la recherche d’alternatives aux logiques néolibérales qui privatisent de pans entiers de l’activité et de l’existence humaine, comme on pourra renouveler l’idée de la participation citoyenne en matière d’environnement et d’habitat.
PATRICK GEDDES UN PIONNIER DE L’ÉCOLOGIE URBAINE
Á MONTPELLIER LES 14 ET 15 JUIN 2019
Colloque organisé par L’École Nationale Supérieure d’architecture de Montpellier
ENSAM, les équipes de recherche du Laboratoire Innovation Formes Architectures
Milieux LIFAM et l’Association Patrick Geddes France APGF
Présentation
Le colloque international Geddes est le fruit de la rencontre des intérêts de deux institutions, l’École Nationale Supérieure d’architecture de Montpellier et la Maison des Sciences de l’Homme Sud, et d’une association, l’Association Patrick Geddes France. L’ENSAM, qui fête cette année ses cinquante ans, est installée pour partie sur le terrain où fut exécuté le Collège des Écossais par Edmond Leenhardt, puis le Collège des Indiens, conçu et exécuté par Franck Mears et transformé par de Jean de Richemond. L’intérêt de l’ENSAM et du LIFAM est grand, à un moment où l’histoire de l’architecture retrouve une importance dans les cursus de formation, car nécessaire à l’histoire du bâti dans toute opération de réhabilitation, facette devenue essentielle du métier d’architecte. Mais au-delà, c’est la prise en compte accrue de l’environnement et de la santé dans les programmes, et diplômes délivrés par l’École qui motive l’intérêt pour les usages contemporains de Geddes.
La même ambition d’afficher des programmes de recherches interdisciplinaires par la MSH Sud explique son engagement pour le colloque. Pour sa part, l’association APGF tient à donner chair à ses objectifs, mieux faire connaître Patrick Geddes et ses travaux, tout en créant des liens avec l’association écossaise qui a lancé de nombreux travaux à Édimburgh. Enfin, ce colloque espère rencontrer l’intérêt des montpelliérains car à Edimburgh l’oeuvre de Geddes est inscrite au patrimoine mondial par l’UNESCO, et qu’en est il à Montpellier ? Quels usages et quelles pratiques sont-ils envisageables ? Geddes, le retour ?
Patrick Geddes (1854-1932) n’est pas un inconnu et il est à nouveau convoqué comme un père fondateur des disciplines de l’aménagement et de l’urbanisme par nos collègues italiens, 50 ans après que Françoise Choay a construit Geddes comme figure de proue d’un aménagement humaniste : Anthropopolis, lignée engendrant Marcel Poète, Lewis Mumford, Jane Jacobs, Léonard Duhl et, last but not least, Kevin Lynch. Les contributions de Robert Stephens, Franco Ferreti, Droor Endeweld, Ilaria Agostini et Alberto Magnaghi sont éclairantes à ce propos. Qu’il s’agisse de la préservation des remparts d’Ahmedabad, de la circulation des théories et pratiques anarchistes dans les îles britanniques, de la projétation de Tel-Aviv ou encore des usages contemporains de Geddes pour évaluer la mégapole (et non la Mégalopolis!) contemporaine, ces contributeurs nous permette de mieux saisir l’existence planétaire de Patrick Geddes. Se serait-elle perdue cette existence, inclassable dans les limites disciplinaires?
Marc Pénin démontre subtilement la nature sociologique des intérêts de Geddes pour l’économie, Luc Doumenc livre un témoignage sensible sur la continuité et la transmission en faisant resurgir la figure attachante d’André Schimmerling. Marie Kenza Bouhadou et Anne Sistel, David Fanfani et leurs étudiants, quant à eux, ont le courage de donner à voir leurs travaux inspirés par Patrick Geddes, nous offrant ce qu’une praxis geddesienne peut aider à construire aujourd’hui, une boussole débarrassée de l’obsession rentière. Les outils et les compagnons de Geddes sont au centre des communications de Pierre Chabard et Daniel Bartement. L’Outlook-tower, pièce maîtresse du dispositif pédagogique, civique, historien et d’urbanisme conçu et construit par Geddes gagne à être recontextualisée, et la lignée et la constellation des compagnons de route montpelliérains précisées.
Enfin, ce colloque se veut « Geddesien » dans la forme, ouvert et destiné au plus grand nombre, oeuvre d’éducation civique et d’ « augmentation de la conscience territoriale » comme le disent nos amis territorialistes italiens. C’est pourquoi une large part est faite à la découverte et à l’expérimentation des lieux et des pratiques. L’Association Patrick Geddes France organise à cette occasion des visites du Collège et de ses jardins (merveilleusement restitués sous la plume talentueuse de Jean-Paul Andrieu), celle du Jardin des plantes de Montpellier, lieu d’une figuration des relations nouées entre une communauté et son territoire par Jean-François Rossi et Thierry Lavabre-Bertrand, Professeurs de Médecine qui s’inscrivent dans la lignée des Charles Martins et Jules Pavillard. Le beau combat victorieux de Catherine Boutry est la preuve vivante du souffle geddesien maintenu à Montpellier, le Jardin de la Reine, un temps promis aux promoteurs reste un jardin.
La fête et le savoir ne sont nullement antinomiques, la présentation de l’ouvrage attendu de Marion Geddes et Jean-Paul Andrieu, La Colline et le Monde, trouve ici son écrin de présentation, le Collège, et son rythme, celui des danses écossaises menées avec fougue par notre autre Marion après un buffet dînatoire composé et réalisé par les étudiants de la formidable association K’Fet de l’ENSAM. Tout cela, nous l’espérons, contribuera de belle manière au cinquantenaire de l’école d’architecture dirigée par Alain Derey qui a été au point de départ de ce colloque.