A voir les chiffres communiqués par les autorités françaises, les compteurs officiels devaient être en panne partout, car à Aix-en-Provence aussi, il y a eu une véritable marée de manifestants qui a envahi le centre ville, amplifiant d’autant le nombre de citoyens venus défendre la protection de l’environnement sur l’ensemble du territoire.

Beaucoup de monde sur le cours Mirabeau et aux alentours de la place de la Mairie, à Aix en Provence, ce 17 Mars 2019


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Une marche du siècle joyeuse et hétéroclite qui s’est fait l’écho d’une vitale conscience collective en matière d’urgence climatique. Démarrant place de la mairie après une série de prise de parole par un responsable des collectifs climat, le président de l’association ZEA et celui de la confédération Paysanne, la manifestation ponctuée d’animations, de pause silence et de chants, s’est terminée par un concert au niveau des allées provençales. Unanimes ce jour là, tous les présents ont sonné l’alarme pour « un changement de paradigme nécessaire», dénonçant « un système de consommation qui ne peut plus perdurer » et appelant à « une vision de l’avenir plus serein notamment via des initiatives multipliées ». En tout, quatre revendications communes, inscrites dans les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), ont été évoquées :


  • Déclarer l’état d’urgence climatique dans l’intérêt d’orienter tous les moyens financiers vers un objectif unique et dans un contexte où plusieurs lois existent pour préserver la biodiversité mais sans être respectées.
  • Tenir les engagements de la Stratégie Nationale Bas Carbonne (SNBC) et respecter le budget carbone pour atteindre la neutralité via la feuille de route en 2050 et respecter, ainsi, les engagements internationaux sur le climat. Et ce, sachant que le non respect des budgets carbone 1 et 2 mettent en évidence une défaillance grave des gouvernements dans la mise en application de cette SNBC.
  • Adopter le pacte « Finance Climat » qui est soutenu par plus de 500 personnalités, scientifiques, spécialistes ou élus, afin de financer une politique climatique européenne rapide, juste et solidaire et que les contraintes budgétaires ne soient plus une excuse.
  • Créer le crime d’écocide, c’est à dire améliorer la reconnaissance juridique des atteintes graves à l’environnement et au climat et engager la responsabilité de chacun pour les dommages climatiques résultant de ses activités en reconnaissant également par là, le droit des enfants à vivre dans un environnement non toxique.
La préoccupante situation à l’île de La Réunion

Parmi les exemples graves de dérèglement climatique détériorant la biodiversité, un des responsables du collectif Climat de l’île de La Réunion, dresse un bilan plus qu’alarmant  : « La température terrestre augmentant fait augmenter la température de l’eau et crée des phénomènes d’évaporation en accentuant l’intensification des cyclones. Ce qui engendre des pluies de plus en plus fortes, des coulées de boues de plus en plus importantes, des vents de plus en plus violents. Les conséquences sur la biodiversité, en particulier sur la barrière de Corail sont importantes. Sur les 22 kms de la fameuse barrière rocheuse, on estime à 30 voire 40% la quantité de coraux disparus, dus à l’acidité des océans qui absorbe tous les gaz carboniques à effets de serre. C’est aussi du à l’activité humaine qui l’active avec des crèmes solaires. Cette situation a des influences directement sur les animaux vivants sur le lagon comme les tortues, baleines, dauphins, menacés». Le même spécialiste conclue en exposant une des victoires du combat quotidien du collectif Climat, qui a permis que deux tortues soient revenues pondre sur l’île. Des reproductions devenues rares depuis de nombreuses années.

L’océan, une assurance vie

De son côté Olivier Dubuquoy de l’association ZEA rappelle « A ZEA on défend l’océan et le climat car les deux sont intimement liés ». Et d’énumérer quelques combats : « L’océan est notre meilleure assurance vie sur la planète. Notre lutte doit être territorialisée car l’océan est notre assurance vie sur la planète. On a bloqué plusieurs permis pétroliers, on a eu une grosse victoire aussi en Corse, on a également bloqué un gros permis ou en Guyane où on a réussi à stopper le projet de Total… Par chance ils n’ont pas trouvé de pétrole, donc c’est bien. On a élargi ce combat donc on a bloqué l’exploitation des énergies fossiles aussi bien en Méditerranée  que sur la façade atlantique et on essaie d’élargir ça au niveau européen et mondial. L’objectif est simple, il est de laisser tout ce qui est hydrocarbure (pétrole, gaz, charbon) dans le sols, ce que préconisent non seulement les communautés autochtones mais aussi les scientifiques, qui expliquent qu’ils faut que 80% des énergies fossiles restent dans le sol. Si on y arrive, on gagne le combat. Mais ils faut mener des actions directes parce que sinon, si on se cantonne à des solutions individualistes, on ne fera jamais la bascule. Car en face c’est un système de destruction massive ! Il va falloir donc s’unir et mener des actions directes ». Et de préciser sur les actions plus locales du côté de Bouc Bel Air visant l’usine Altéo : «  Parmi les luttes locales, il y a la lutte contre les boues rouges. Jusqu’à fin 2015, elles étaient rejetées en mer, maintenant elles sont rejetées pour la partie liquide en mer et la partie solide du côté de Mange Garri. On a réussi à bloquer une partie de cette production qu’ils appellent de la valorisation du côté du port de Bayonne et on a réussi à faire basculer hier le maire de Bouc Bel Air qui était plutôt laxiste sur cette pollution. On espère mettre fin en 2019 à cette pollution ».

Convergence pour la confédération paysanne

Enfin, le représentant de la confédération paysanne a conclu cette série d’intervention : « On est dans cette convergence d’actions directes non violentes. Que les gilets jaunes, rouges, verts s’unissent pour qu’on en fasse voir de toutes les couleurs à quelqu’un qui a pris le pouvoir d’une manière “ usurpative ” en faisant peur face au FN. On a tous fait des analyses d’urine, on a tous du Glyphosate grâce à notre cher Macron. On ne peut attendre trois années supplémentaires, donc passons à l’action directe non violente sur le territoire, au péage autoroutier, sur les océans, partout ».

L’urgence locale

La veille, ils étaient plus de 2500 jeunes manifestants à parcourir les rues d’Aix pour défendre un environnement viable et réclamer des actions concrètes au gouvernement, dans ce même contexte d’urgence climatique où les plus gros pollueurs ne sont toujours pas sanctionnés.

Dimanche 17 mars enfin, c’est un cortège important qui s’est rendu sur le site dépotoir des boues rouges solides de l’Usine Altéo dans les collines de Bouc Bel Air à Mange Garri. Invité par l’association ZEA, José Bové, présent était en tête de la manifestation. En tout, ce sont 350 000 tonnes de déchets toxiques qui sont déversées ici, à ciel ouvert, chaque année. Présente ce jour-là, la secrétaire de l’association CD2A, qui lutte contre les nuisances et la privatisation de l’aérodrome des Milles, rapporte : « Plusieurs centaines de personnes étaient ulcérées par les pratiques de prédateurs industriels obsédés par la rentabilisation à tout prix (comme EDEIS) ». Et de poursuivre : « A l’entrée de l’un des sites soi-disant gardé, il y avait une barrière ouverte, sur laquelle on pouvait lire qu’il s’agit d’une ICPE « Installation Classée pour la Protection de l’Environnement ».

Une lettre à signer, a été distribuée afin que chaque citoyen l’envoie individuellement. Destinée à Martine Vassal, présidente D’Aix-Marseille Métropole, cette lettre rappelle la toxicité de ces boues qui continuent de polluer la mer et s’accumulent dans les collines à hauteur de 350 000 tonnes par an, exigeant de l’élue une mise en sécurité du site de Mange Garri dans les plus brefs délais, le refus catégorique de la demande de prolongation du stockage des boues après 2021, une véritable étude de l’impact de ces boues sur la santé des riverains et des travailleurs à proximité, la fin du rejet de la partie liquide à la mer et l’arrêt immédiat des tentatives de valorisation des résidus toxiques, nommés, Bauxaline.

H.B.  textes et photos

[vc_message message_box_color= »pink » icon_fontawesome= »fa fa-newspaper-o » css_animation= »none »]Voir aussi du même auteur: Altéo – Des boues rouges jusqu’au tribunal[/vc_message]
H.B
Journaliste de terrain, formée en linguiste, j'ai également étudié l'analyse du travail et l'économie sociale et solidaire. J'ai collaboré à différentes rédactions, recherches universitaires et travaillé dans divers domaines dont l'enseignement FLE. Ces multiples chemins ailleurs et ici, me donnent le goût de l'observation et me font aimer le monde, le langage des fleurs et ces mots d'André Chedid : «Cet apprentissage, cette humanité à laquelle on croit toujours».