Les Sorcières de Salem revisitées
le réalisme ne consiste pas à reproduire les choses réelles, mais à montrer comment les choses sont réellement.
La pièce est issue du grand théâtre réaliste américain. Elle est fondée sur les événements entourant le procès en sorcellerie en 1692 à Salem dans le Massachusetts. Arthur Miller décrit l’évènement comme une allégorie du maccarthysme. L’auteur tend un fil entre les années 1950 et 1692 pour faire apparaître des similarités. On verra que ce fil rejoint par endroits le grand confinement de 2020. Miller sera lui-même mis en cause par le Comité sur les activités anti-américaines. La sorcière, fascinant personnage imaginaire, symbole de la femme désespérée par la triste réalité des siècles, de misères, de crimes et de ténèbres. Mais la femme que l’on dit ensorcelée est aussi perçue comme une protestation de l’esprit de liberté contre l’église et le pouvoir. La sorcière s’efforce de retrouver par des alliances mystérieuses le contact avec les forces sensibles du monde. Dans Les sorcières de Salem couve le drame de l’exclusion. Aujourd’hui peut-être le harcèlement, le sentiment de solitude lorsqu’on n’a plus de réseau, qu’on s’en exclu ou qu’on en est exclu par les autres.
Les procès en sorcellerie passent désormais par nos smartphones. Les sorcières dansent sur les réseaux sociaux. Dites-vous bien que tout cela est bien réel. Bertolt Brecht n’est pas le dernier à s’en souvenir, lui qui prétendra que le réalisme ne consiste pas à reproduire les choses réelles, mais à montrer comment les choses sont réellement.