Interprète jadis du héros masculin de cet opéra célèbre, le contreténor est passé à la direction. Première d’une tournée internationale, le 3 novembre à l’Opéra Berlioz de Montpellier.
Il fait partie du baroque montpelliérain et est très attendu ! Philippe Jaroussky a tellement révélé au public, toujours conquis, des trésors du répertoire, et proposé tant de nouveautés que la première d’Alcina de Haendel promet d’être un grand moment. Ses résidences à l’Opéra Orchestre National Montpellier Occitanie (OONMO) ont permis plein de découvertes. Il y a eu, en dehors des récitals, l’expérience unique, pendant le Covid, de l’oratorio de Scarlatti Il primo Omicidio, où le contreténor faisait ses débuts comme chef à la tête de son ensemble Artaserse.
Ensuite il a dirigé Jules César de Haendel en 2022, et l’Orfeo de Sartorio l’année suivante. S’il a bien sûr beaucoup chanté, c’est dans ses années de résidence qu’il est passé à d’autres projets, notamment avec Thibaut Garcia, « À sa guitare ». Ses ateliers sont aussi le reflet de son engagement pour la jeunesse, Master Class et concert de l’Académie Musicale qu’il a fondée et qui porte son nom. Et n’oublions pas sa mobilisation contre le harcèlement à l’école lorsqu’il a chanté College Boy avec Nicola Sirkis pour les 40 ans d’Indochine au Stade de France.
La passion d’Alcina
Philippe Jaroussky a offert en avril au public montpelliérain un formidable Mitridate, re di Ponte de Mozart, toujours disponible en streaming. Mais sa création, lundi prochain, est un événement car Alcina est un trésor personnel pour le musicien polyvalent, qui a tâté de tous les instruments avant d’explorer sa voix. Les belles pages composées par Haendel en 1735 à partir de l’Orlando furioso de l’Arioste ont mis bien sûr en valeur l’héroïne principale, la sorcière éponyme, mais ont proposé au célèbre castrat Giovanni Carestini le rôle du chevalier Ruggiero et des airs aussi virtuoses qu’émouvants.

Philippe Jaroussky s’y est beaucoup consacré puisqu’il a interprété ce rôle à Aix en 2015, et ce moment de fureur et de magie, mis en scène par Katie Mitchell et dirigé par Andrea Marcon, a été enregistré en DVD (Warner). À Monte Carlo il était Ruggiero en version concert en 2016, puis avec Cecilia Bartoli en 2023, mis en scène par Christof Loy. Il a chanté les airs de cet opéra, le fabuleux Verdi prati, l’époustouflant Sta nell’ircana pietrosa tana, le trio Non è amor… à Salzbourg, mais aussi aux Champs-Élysées, notamment en juin dernier pour fêter ses 25 ans de carrière.
Métamorphoses baroques
Pas besoin de couronnement — Philippe Jaroussky a déjà sa statue au Musée Grévin ! — mais diriger Alcina est un nouveau challenge que s’est fixé le contreténor devenu chef d’Artasers, ensemble fondé en 2002. C’est Carlo Vistoli qui sera le héros Ruggiero face à la terrible Alcina incarnée par Kathryn Lewek, accompagnés par Katarina Bradić, Zachary Wilder, Nicolas Brooymans, et la jeune soprano perpignanaise Lauranne Oliva. Tous partagent beaucoup de passion, de trahison, de jalousie ! Car si la sorcière renonce à transformer son chevalier en monstre et préfère l’envoûter, celui-ci brisera ses charmes et libérera ses victimes.
De ces pouvoirs Philippe Jaroussky est le maître, à la baguette, et l’opéra de Montpellier a la chance d’inaugurer une tournée qui va ensuite mener Alcina à Paris, Barcelone, Madrid. Avec Haendel la magie opère.
Michèle Fizaine
Alcina de Haendel, le 3 novembre à 19h, à l’Opéra Berlioz au Corum de Montpellier.
Version de concert : durée 3h10.
Ensemble Artaserse dirigé par Philippe Jaroussky, avec Kathryn Lewek, Carlo Vistoli, Lauranne Oliva, Katarina Bradić, Zachary Wilder et Nicolas Brooymans.
26 à 47 €. Réserver.
Photo 1. Après avoir longtemps chanté les airs d’Alcina, Philippe Jaroussky dirige maintenant cet « opera seria » de Haendel. Crédit photo Amandine Lauriol
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