Durant trois mois, la tournée « La Région toujours là à vos côtés » a parcouru l’Occitanie pour recueillir les attentes des habitant.e.s sur le pouvoir d’achat, la mobilité, la santé ou encore la jeunesse. Présentée comme un exercice d’écoute citoyenne, la démarche interroge : ouverture réelle au changement ou simple validation d’une politique déjà tracée ?
De mi-avril à fin juillet, Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, et ses élus ont sillonné les 13 départements pour aller « à la rencontre » des habitant.e.s. Près de 300 étapes, des milliers d’échanges et un objectif affiché : retisser le lien entre élu.e.s et citoyen.ne.s, en prise directe avec les réalités du quotidien.
Les priorités exprimées au fil de cette tournée n’ont rien d’anecdotique. Les habitant.e.s ont mis en avant la mobilité souhaitant la réouverture de lignes de train, davantage de pistes cyclables et le prolongement de la LGV jusqu’à Toulouse et Perpignan. Ils ont aussi insisté sur la transition écologique, avec la rénovation énergétique des logements et le développement des énergies renouvelables, et sur la jeunesse, demandant un meilleur accompagnement à l’orientation, des aides alimentaires pour les étudiants et plus de stages. La santé et le vivre-ensemble complètent ce tableau, avec des appels à soutenir les hôpitaux publics, recruter des médecins, lutter contre le racisme et renforcer les lieux de proximité.
On constate ici que les attentes relèvent pour bonne part de l’insuffisance des financements de l’État qui dans nombre des domaines identifier par les citoyen.ne.s, s’illustre par sa myopie et une tragique absence de mise en perspectives. Cela renvoie en outre à une nouvelle étape de la décentralisation évoqué par le Premier ministre Sébastien Lecornu qui semble pour l’instant avoir d’autres chats à fouetter.
Qu’est ce que les espaces de concertation traduisent ?
Face au attentes locales, la Région promet de prolonger la dynamique : une nouvelle tournée est annoncée pour 2026 afin de « renforcer la proximité » et assurer le suivi des propositions recueillies. S’y ajoutera la création d’un Comité Régional du Dialogue Citoyen, instance permanente censée garantir un échange continu entre élu.e.s et citoyen.ne.s.
La démarche présente assurément le mérite d’être dans une disposition d’écoute des citoyen.ne.s en continu et pas seulement durant les campagnes électorales. Mais ce dispositif d’écoute pose question. Ces démarches participatives, qui se multiplient dans les politiques publiques, ouvrent-elles vraiment la voie à la coconstruction des décisions ? On peut s’interroger sur ce que cette multiplication d’espaces de concertation traduit : volonté d’ouverture ou besoin de légitimation ? La démarche participative, souvent présentée comme un progrès démocratique, peut aussi devenir une forme d’injonction à participer où l’écoute est mise en scène autant qu’elle est pratiquée.
L’initiative va dans le bon sens : elle reconnecte les élu.e.s à un territoire vaste et complexe. Mais la participation n’a de sens que si elle bouscule les politiques déjà définies, pas si elle vient seulement les valider. Pour l’Occitanie qui annonce vouloir mettre la fabrique de l’action politique au cœur du débat, la démocratie participative se joue désormais à cette frontière : entre la consultation et la transformation réelle des décisions publiques.
La tournée régionale a le mérite d’exister, de remettre des visages derrière des politiques souvent abstraites. Reste à voir si la parole citoyenne collectée sera traduite en actes concrets ou si elle se dissipera, comme souvent, une fois la caravane passée.
Jean-Marie Dinh
Photo. conférence de presse, bilan mi mandat, hôtel de Région, Montpellier, 24 octobre 2025
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