La Venise du Languedoc, appelée aussi « L’Île Singulière », est connue pour ses lieux emblématiques entre mer, étang et canaux, de la Pointe Courte au Mont Saint-Clair. Son identité, sa culture locale, ses créations populaires continuent de surprendre et de poser quelques questions « singulières » ! Une balade estivale à Sète à suivre cet été avec Altermidi au fil de nos articles. Dernier épisode.
Sète, port du Sud de la France récemment élu premier au classement de plaisance Navily, est riche de milliers de navires. Des visiteurs historiques et des barques au quotidien. Terminons nos questions singulières avec un tour d’horizon entre mer, canaux et étang.
« C’est pas l’homme qui prend la mer… », chante Renaud sur les mots de Joseph Kessel. Les navires qui font escale à Sète captivent nos regards, animent la vie courante, donnent sens aux noms des lieux et des quartiers qui composent sa géographie maritime. Et dans les mémoires, les festivités d’« Escale à Sète », au fil de ses éditions, ont laissé le souvenir de bâtiments illustres.
Quand les voiliers font la parade
Difficile de dire lequel on préfère… Certes on se souvient du Kruzenshtern, navire-école russe, quatre-mâts géant de 114 mètres de long, aux 35 voiles, qui a été un fidèle dès 2012, et a accueilli bien des visiteurs. Pour Wolfgang Idiri, le directeur de la manifestation bisannuelle, le Santa Eulàlia, superbe trois-mâts du musée maritime de Barcelone, une des dernières goélettes majorquines, a été présent dès les premières éditions et a tracé la voie aux bateaux de légende.

Depuis ils sont venus nombreux. Dans la famille on cite le Belem, et sa légendaire coque en acier, l’Hermione, frégate de Lafayette et sa proue à tête de lion, le Morgenstern, ce brick hollandais centenaire. La série est vite devenue historique. El Galeon est la reproduction unique d’un galion espagnol du XVIème siècle – et c’est le bateau de « Pirates des Caraïbes » ! Le Shtandart est la réplique de la frégate du tsar Pierre le Grand, et le Pandora celle d’un de ses avisos, un beau voilier rapide, avec une figure de proue aux seins nus. La Grâce recopie un brick tchèque du XVIIIème siècle. Enfin, il y a eu des vedettes, au sein de cette armada, le Nao Victoria de Magellan et le Nao Santa Maria reproduction de la caraque de Christophe Colomb ! Au risque d’en oublier, nombreux sont les bateaux historiques invités à accoster sur l’Île Singulière, et à faire revivre des épisodes mémorables, parades et batailles navales.

Quant aux voiles latines, c’est une tradition, la plus ancienne au monde, et ces bateaux de pêche sétois, accompagnés des barques venues de Catalogne, offrent une vision poétique, on n’oublie pas leur cambrure caractéristique. Les « bateaux-bœufs » datent du XVIIème siècle, caractérisés par une pêche particulière unissant deux bateaux à un même filet, selon la technique « bœuf ». On les photographie volontiers, et l’association « La Plagette » accueille des chantiers de réparation. Leur voilure triangulaire est le symbole d’une Méditerranée toujours présente.
Petits et gros bateaux au quotidien
Les canaux, même lorsqu’il n’y a pas les tournois de joutes, sont parcourus par des « sapinous », des « pinasses », rapides et maniables, et nombre de barques et de nacelles. Deux modèles issus de ce patrimoine ancien, bateaux agiles des lamaneurs, destinés à un usage ordinaire, ont été restaurés il y a quelques années, et les nouvelles animations de l’association « Chiviraseta », parades et navirades, mettent en valeur les petits voiliers et les barques. Les rameurs accompagnent hautbois, tambours et chanteurs sur les canaux, pour des aubades traditionnelles ou lyriques. Un grand succès.
Les opérations de dépollution occupent aussi les canaux et sont souvent remarquées. Elles se sont multipliées à Sète, qui est la première collectivité à doter son territoire d’une brigade. Dès 2020 le trois-mâts Le Kraken, qui était là le mois dernier, avait entamé sa campagne européenne avec « Wings of the Ocean », et la Brigade Bleue de Sète est partenaire, avec son responsable, Samir El Mokkedem, qui tient à sensibiliser pêcheurs, plaisanciers et surtout scolaires. Des bateaux très engagés…

Il y a tous les jours une circulation très active, des bateaux bus qui font le trajet du port de Mèze jusqu’au pont de la gare de Sète, d’autres parcours de balades, « Ecothau » de Balaruc-les-Bains à Sète, des trajets festivaliers du Mas Coulet au Théâtre de la Mer, et le bateau-bus gratuit qui relie au centre ville le mercredi. Depuis peu « Mini-Boat Sète » propose aussi des mono places pour des escapades découvertes. Entre étang de Thau et canal du Midi, il y a bien des lieux pour jeter l’ancre.
Du côté des géants il y a des bateaux qui n’échappent pas aux regards. Récemment, On a bien sûr remarqué le Danielle Casanova, ferry de « Corsica Linea », qui est venu à Sète réussir sa connexion au réseau électrique, et en juin l’imposant paquebot résidence The World avec ses 160 appartements vendus des millions de dollars. Un autre monde…
De loin et de tout près
C’est toute une armada que Sétois et touristes suivent du coin de l’œil. Mais il y a des domaines réservés, les ports de pêche, de commerce et de plaisance, rarement accessibles. Les Fêtes du Patrimoine sont l’occasion de mieux découvrir le monde du travail au sein des bateaux : 22 thoniers, 13 chalutiers, 30 petits métiers maritimes…
Les journées européennes « Ports Ouverts » sont organisées du 19 au 21 septembre, dans le cadre de ces célébrations annuelles, et permettent de vivre dans l’univers portuaire et sa vie quotidienne. Ainsi le vendredi fait visiter le port de pêche et surtout la Criée et ses enchères. Ses poissons, les « bleus » – anchois, sardines, maquereaux, saumon, hareng, bonite et thon (50 % du thon français !) -, les « blancs » – baudroie, merlu, rouget, daurade sole limande… 120 espèces à découvrir. Samedi, « Plaisance » avant tout, au bout du Môle, et embarquement pour la visite du port. Dimanche, visite du port de commerce, ses métiers, ses activités, commentés par les professionnels, et visite des navires de lamanage, remorquage, protection et sauvetage SNSM… Il y a beaucoup à découvrir parmi les projets pour la protection de l’environnement et les actions de développement durable.

La musique trad’ sera aussi au rendez-vous, au Dancing, quai des Moulins, le dimanche 21 à 16 h, pour un atelier de danse. Avec « Biscam Pas », on peut se lancer dans bourrées, rondeaux et rigaudons. Un balèti prend le relais à 17 h 30, et les élèves de hautbois et tambour du Conservatoire rejoignent avec Alain Charrié les musiciens Marie Frinking et Philippe Carcassés. Auparavant Jordan Saisset, responsable musique et patrimoine du Cirdoc, présente l’exposition « A travers les imaginaires sonores des pays d’Oc ».
Portes ouvertes sur les ports : « C’est la mer qui prend l’homme », concluait Renaud sur sa goélette urkrainienne anarchiste Makrovchtchina. « Dès que le vent soufflera »… soyez les bienvenus au triple port de Sète, et embarquement immédiat pour les visites !
Michèle Fizaine
Journées « Ports Ouverts 2025 », du 19 au 21 septembre. Places limitées sur inscription dès le 1er septembre. Programme sur www.sete.port.fr
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