Lait, œufs, poissons… Les PFAS, polluants éternels1, se retrouvent dans nombre de nos aliments, alerte l’ONG Générations futures. Selon son étude, les données sur la teneur des denrées en PFAS manquent et la réglementation est « dépassée et inadéquate » pour protéger les consommateurs.
Deux poissons sur trois, 40 % des œufs et un quart des laits contiennent au moins un des quatre « polluants éternels » (PFAS) concernés par une limite réglementaire dans certaines denrées alimentaires, affirme Générations futures qui dénonce une « contamination généralisée » des aliments. L’ONG souligne les difficultés rencontrées pour rassembler les données puisque seule une poignée de ces très nombreux produits chimiques per- et polyfluoroalkylées (PFAS) doivent être contrôlés dans les aliments. Elle ajoute que « seuls 8 pays ont transmis des données » à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) pour 2023.
Dans son étude publiée jeudi, Générations futures analyse donc les données de l’Allemagne, du Danemark, des Pays-Bas, et de la France en retard par rapport aux trois pays précédents et dont les données, limitées à certaines denrées, font que la contamination globale est « sous-estimée ».
Résultat : « 69 % des poissons, 55 % des abats, 55 % des mollusques, 39 % des œufs, 27 % des crustacés, 23 % des laits et 14 % des viandes contiennent au moins l’un des quatre PFAS réglementés » par l’UE qui a établi les teneurs maximales pour « seulement » quatre substances (PFOS, PFOA, PFHxS, PFNA)2 dans ces produits.
L’ONG déplore l’absence dans cette liste des aliments pour enfants, des fruits, légumes, céréales et des produits laitiers, et voudrait élargir la liste des PFAS mesurés.
Réglementation insuffisante
Elle rappelle que les PFAS utilisés dans l’industrie, dans des herbicides comme le flufenacet, très utilisé et récemment interdit dans l’UE, mais aussi dans les emballages alimentaires et ustensiles de cuisine, sont susceptibles de contaminer « l’ensemble de la chaîne alimentaire ».
les PFAS sont des molécules persistantes, qui ne se dégradent pas dans l’environnement. Elles sont extrêmement mobiles. Or elles sont utilisées dans de très nombreux objets du quotidien. Ainsi quasiment tous les emballages au contact d’aliments en contiennent en raison de leurs propriétés antitaches et de résistance à l’humidité. On en trouve aussi dans les vêtements déperlants, les chaussures imperméabilisées, les poêles antiadhésives, les tissus antitaches…
« L’alimentation est identifiée (par l’EFSA) comme la principale source d’exposition aux PFAS pour la population », mais les données sur la teneur des denrées en PFAS manquent cruellement et la réglementation est « dépassée et inadéquate pour protéger la santé des consommateurs » puisqu’elle n’aboutit qu’à « très peu » de retraits du marché, selon Générations futures.
L’EFSA a établi « la dose hebdomadaire tolérable pour la somme des quatre PFAS réglementés à 4,4 ng/kg de poids corporel par semaine », mais les limites réglementaires « ne permettent pas de rester en dessous », poursuit l’ONG. Un enfant de quatre ans, en mangeant un œuf « à la limite de conformité », consommerait ainsi « 140 % de la quantité tolérable » de PFAS pour toute une semaine d’alimentation. « La consommation de 500 g de viande à la limite de conformité correspond à deux fois et demi la quantité hebdomadaire tolérable pour un adulte de 60 kg. »
Le Danemark a interdit la présence de PFAS dans tous les emballages alimentaires depuis 2020. Et la transition s’est faite sans problème. En France — tout comme dans les autres États européens — on connaît le danger depuis plus de vingt ans, mais rien ne se passe.
Avec Afp
Notes:
- Les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, également appelés « polluants éternels », car elles ne se dégradent pas.
- PFOS : induit des altérations épigénétiques et est immunosuppresseur chez les humains exposés ; PFOA : cancérigène pour l’humain ; PFHxS : effets perturbateurs sur la voie des hormones thyroïdiennes ; PFNA : lésions oculaires graves/irritation oculaire.