Sécheresse, guerre, famine, inflation… le moins qu’on puisse dire en ce début d’année, c’est que le monde n’est pas dans son assiette. En consacrant ce numéro à l’alimentation nous avons choisi de regarder ce qui s’y trouve mais aussi comment les aliments que nous mangeons impactent notre rapport à la vie.
« N’y a-t-il pas un système économique de l’alimentation qui fait de nous des gloutons de contresens ? »
s’interroge la nutritionniste Lyvia Estivals.
Dépasser les limites de notre assiette en sortant de l’approche réductionniste très rentable de l’industrie agroalimentaire et de la grande distribution nous a conduits à remonter la chaîne pour nous intéresser aux conditions de production. Les conséquences sociales et écologiques de l’élevage intensif sur la planète sont catastrophiques rappelle Sasha Verlei. Son article pointe les effets de la surexploitation sur la condition animale. Ce que confirme les petits éleveurs de poules que nous avons rencontrés dans l’Hérault et le Vaucluse qui s’expriment sur les contraintes administratives inadaptées qui leur sont imposées.
« Il faut tout avaler. Avaler sans mesure d’avaler. Avaler jusqu’au bout toute la chaîne de production, alimentaire (ou pas) » nous donne à entendre la voix poétique de Lili Frikh dans la rubrique Hiatus. Un grand renouvellement est en cours. Le confinement a bouleversé le style de vie des Français.es, notamment dans les habitudes alimentaires. La guerre en Ukraine, qu’abordent Maguy Marin et le jeune artiste ukrainien Denys Zhdanov dans la rubrique culture, n’est pas sans conséquences. Les difficultés d’approvisionnement et l’inflation alimentaire liées au conflit viennent lourdement s’ajouter à la problématique. En 2022, Eurostat a constaté une augmentation de 18,2 % des produits alimentaires dans l’UE. Ces évolutions touchent particulièrement les personnes en situation de précarité, mais pas seulement ; elles représentent une menace à terme pour la cohésion sociale. L’alimentation, un des déterminants majeurs de la santé, joue un rôle essentiel sur les questions d’identité, de liens social et familial, de plaisir, de culture, d’appartenance. Vous en saurez plus en répondant au quizz Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le cannibalisme sans jamais oser le demander.
À l’examen des journalistes et des contributeurs d’altermidi, le thème de l’alimentation s’est révélé immense. Sans en faire le tour, il est passionnant d’identifier une partie des processus masqués et d’observer les lignes bouger à l’échelle de nos territoires. À Toulouse, Marseille, Avignon et dans l’arrière pays, les citoyen.ne.s ne manquent pas de vitalité pour se mobiliser et agir sur les enjeux environnementaux, économiques et politiques. Ce numéro rend compte de plusieurs projets innovants, comme la démarche démocratique d’un comité citoyen qui expérimente une sécurité sociale de l’alimentation à Montpellier, de supermarchés coopératifs gérés par les citoyen.ne.s, ou encore de l’Assemblée citoyenne du Conseil départemental de Haute-Garonne qui permet à 162 citoyen.ne.s de contribuer à la politique publique.
Tous les facteurs concomitants contribuent à la nécessité de repenser notre politique alimentaire à l’échelle globale et locale. Nos actes individuels et collectifs ont un rôle à jouer ; il est possible d’agir et essentiel de le faire, même si cela ne remplace pas les mesures qui doivent être prises au sommet pour consommer moins de ressources et en finir avec le toujours plus.
Jean-Marie Dinh
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