Suite aux violents affrontements qui ont éclaté samedi lors de la manifestation contre les bassines dans les Deux-Sèvres, Gérald Darmanin met l’accent sur la responsabilité de l’extrême gauche. Organisateurs et élus témoignent du nombre important de participants et dénoncent la répression brutale qui fait écho à celle subie par le mouvement social contre la réforme des retraites.


 

Environ 25 000 manifestants, militants de toute la France et délégations étrangères venues d’Italie, de Belgique, d’Espagne, de Suisse, d’Allemagne, représentants des sans-terre du Mali, du Chili, de Colombie, des peuples amérindiens, ont répondu à l’appel de la Confédération paysanne et du collectif « Bassines non merci ! » ce samedi 25 mars.

Des heurts violents avec les forces de l’ordre présentes en grand nombre sur le site (gendarmes et CRS, dont une brigade mobile en quad armée de flashball) ont eu lieu alors que les manifestants se déployaient sur le terrain immense en direction du trou qui constitue le chantier.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, fustige l’extrême gauche : « Ce ne sont pas les forces du désordre et l’extrême gauche qui vont l’emporter dans la République française. » Le ministre annonce 24 gendarmes blessés, dont un en urgence absolue au pronostic vital non engagé et 7 manifestants dont deux en urgence absolue.

Selon le parquet de Niort, qui établit ce jour à 13 heures un nouveau bilan, 29 gendarmes ont été blessés, dont deux placés en urgence absolue sans que leur pronostic vital soit engagé, l’un touché à l’aine, l’autre avec un traumatisme respiratoire.

 

Les organisateurs dénoncent une déferlante de violences injustifiée

 

Dans son dernier communiqué, le mouvement Les soulèvements de la Terre (voir lien) recense pas moins de 200 blessés, plusieurs blessures type brûlures et plaies profondes provenant de grenades de désencerclement et de tirs de LBD, une dizaine de blessés graves transférés au CHU, plusieurs traumatismes faciaux. Trois blessés sont en état d’urgence absolue, dont un manifestant dans le coma avec un pronostic vital engagé et deux personnes au pronostic fonctionnel engagé.

Une enquête « spécifique », selon le procureur, a été ouverte pour déterminer la nature et les circonstances de ces blessures. Pour les autres blessés — sept personnes emmenées au CHU — les investigations seront menées dans le cadre de procédures judiciaires ouvertes samedi. Le bilan « provisoire » fourni par le procureur ne porte que sur les blessés pris en charge par les secours. Il est précisé que des vérifications auprès des services hospitaliers sont en cours.

Lors du rassemblement, plusieurs équipes d’observateurs des pratiques policières et des libertés publiques de la Ligue des droits de l’Homme France ont documenté la situation. La LDH dénonce (voir lien) « une entrave par les forces de l’ordre à l’intervention de secours… », affirmant sur Twitter, « qu’une urgence vitale a été signalée au Samu », lequel a déclaré à un médecin lors d’une conversation en présence d’avocats « ne pas pouvoir intervenir dès lors que le commandement leur avait donné l’ordre de ne pas le faire » alors que « la zone était parfaitement calme » et que « la situation sur place ne faisait pas obstacle à l’arrivée du Samu ».

La préfète des Deux-Sèvres explique qu’il s’agissait de faciliter et sécuriser l’intervention des secours pour la prise en charge des blessés.

Des élus présents sur le terrain témoignent sur Twitter : Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV, déclare : « j’ai vu au moins 12 blessés de mes yeux dont deux très graves… », en ajoutant que le nombre de victimes parmi les manifestants est évidemment plus important. David Cormand, député européen écologiste, condamne quant à lui la mobilisation inutile des forces de police et un maintien de l’ordre particulièrement brutal et belliqueux, responsable des blessés des deux côtés : « J’étais présent à Sainte-Soline pour la manifestation d’opposition aux bassines. Absolument rien ne justifiait de mobiliser des milliers de gendarmes et CRS pour protéger un site constitué d’un trou de terre sans rien de dégradable… »

Dans un communiqué, la Confédération paysanne précise que le gouvernement cherche à criminaliser le mouvement anti-bassines pour justifier les violences à l’égard des manifestants. Les militants se sont aussi exprimés à l’extérieur du site par des conférences, des plantations de 300 mètres de haies (moyen de retenir l’eau), l’élaboration d’une serre sur une parcelle de Sainte-Soline, le démontage d’une pompe centrale et de canalisations. Le syndicat paysan souligne qu’au-delà de l’opposition aux méga-bassines, c’est un modèle agricole respectueux de l’environnement, à taille humaine et partageur des ressources d’eau qui est mis en avant. L’eau, bien commun, indispensable à la vie, ne peut être privatisée.

Avec AFP

Photo : Des manifestants à Sainte-Soline, le 25 mars 2023. © AFP – Thibaud Moritz

Lire aussi : La manifestation contre les mégabassines dégénère

Sasha Verlei journaliste
Journaliste, Sasha Verlei a de ce métier une vision à la Camus, « un engagement marqué par une passion pour la liberté et la justice ». D’une famille majoritairement composée de femmes libres, engagées et tolérantes, d’un grand-père de gauche, résistant, appelé dès 1944 à contribuer au gouvernement transitoire, également influencée par le parcours atypique de son père, elle a été imprégnée de ces valeurs depuis sa plus tendre enfance. Sa plume se lève, témoin et exutoire d’un vécu, certes, mais surtout, elle est l’outil de son combat pour dénoncer les injustices au sein de notre société sans jamais perdre de vue que le respect de la vie et de l’humain sont l’essentiel.