Delta1 de Michele Vannucci Panorama longs métrages. Cinemed 2022.
Un homme seul sur une barque rame en silence au milieu d’un canal marécageux. Il perçoit le bruit approchant d’un hélicoptère qui surveille la zone et se cache à l’abri de l’enchevêtrement des arbres. Le danger passé, il pêche à l’électricité et des dizaines de poissons remontent, ventres à l’air.
Osso est un volontaire pacifiste qui surveille le parc national du delta du Pô délaissée par l’autorité institutionnelle. Outre la pollution récurrente des usines, c’est l’arrivée récente d’une famille de braconniers qui va focaliser la colère des pêcheurs locaux s’astreignant à respecter la réglementation.
Nous voici partis pour un thriller en eaux troubles, un film « d’ambiance » où le Delta du Pô campe un des personnages principaux. Un no man’s land fantomatique où les pêcheurs du cru et les braconniers rivaux tentent de se frayer un chemin de plus en plus animal pour survivre.
Plongés la brume du Delta, dans des tons marron, une eau trouble dont on ne perçoit pas le fond, un méandre d’arbres marécageux où la lumière du jour ne perce pas et beaucoup de scènes de nuit. Par deux reprises dans le récit, après de longues plongées nocturnes, apparaît la clarté presque surprenante du levé du jour, une lumière qui donne l’impression de sortir la tête de l’eau pour prendre sa respiration. Les lumières jaune-orangé en intérieur contribuent à une atmosphère trouble.
Le ton nous rappelle également celui du conte qui ouvre l’imaginaire par l’intermédiaire d’un bestiaire réel ou suggéré, mais toujours présent dans le décor.
Osso est lié à cette terre par l’héritage familial et reste habité par son passé tourmenté. Prenant le parti de la raison et de la non-violence, il entretien une relation protectrice avec sa sœur qui, elle, est une activiste engagée qui privilégie la confrontation et lui renvoie violemment la souffrance qu’il tait et sa soumission. Elia est un enfant du coin, sans attache, devenu braconnier, adopté par une famille étrangère pauvre. Sa rusticité est servie par un physique d’ours qui lui sert à préserver son territoire.
La famille vit à la merci d’un mafieux sans scrupule et mauvais payeur ce qui va mener au drame non prémédité, d’où débutera une longue traque et la confrontation d’Osso et Elia. Deux êtres qui semblent diamétralement opposés, tant physiquement que par leur histoire et pourtant entre lesquels va naître dans l’affrontement une relation quasi fraternelle.
VD