Le témoignage de Zoé a été recueilli dans le numéro #3 d’altermidi mag de février/avril 2022. Nous le republions ici en appui de l’enquête que nous ouvrons sur le site : Jeunes et politique
Zoé, 25 ans, anthropologue vacataire au CNRS
Mon dernier vote remonte au premier tour de l’élection présidentielle de 2017. La personne pour qui j’ai voté ne s’est pas qualifiée, du coup je n’ai pas voté au second tour. Je ne pense pas que j’irai voter à la présidentielle et aux législatives en avril et en juin prochains. J’aurais pu si j’étais au clair sur mon lieu de vote, mais comme j’étais domiciliée à Toulouse et que j’ai déménagé depuis, je ne pense pas faire les démarches d’ici les élections. C’est bien de voter, je ne suis pas contre, mais je ne suis pas vraiment sensibilisée à cette pratique. Hormis les présidentielles, les médias couvrent peu les élections.
« Dans mon entourage proche on parle très peu de politique. Quand j’étais plus jeune, je n’ai jamais accompagné mes parents pour aller voter. On n’aborde jamais le sujet dans notre parcours scolaire.»
En tant qu’anthropologue, ce ne sont pas trop les représentant.e.s politiques qui m’intéressent, mais plutôt les systèmes de contraintes et de régulation des conflits que l’on peut observer à petite échelle comme celle du domicile. Je m’implique en politique dans ma cellule familiale. Si on prend l’exemple des fêtes de Noël, le fait que certaines personnes puissent assister au repas familial et d’autres non ; les rôles respectifs qui s’exercent entre parents et enfants dans les relations intra-familiales ; comment gérer la violence ? Qui l’impose, qui la subit ? À l’échelle familiale, j’ai le sentiment que mes actions produisent des résultats. C’est moins évident lorsqu’on dépose un bulletin dans une urne.
M’impliquer dans le microcosme familial, le prendre comme une composante du politique, ne m’empêche pas de considérer des enjeux qui dépassent ce contexte. Je suis très sensible aux rapports que nous avons avec les autres formes de vie, avec la nature, les animaux. J’ai consacré mon mémoire aux rapports qu’entretiennent les bergers avec leur troupeaux de brebis. Par extension, cela recoupe les questions politiques relatives au développement durable et à la pensée écologique. Un autre enjeu m’apparaît également important aujourd’hui, c’est celui de l’égalité, des discriminations subies dans certains cercles sociaux. Cela a rapport à notre conception de la justice sociale. Le modèle de la méritocratie qui s’impose réduit la protection sociale et met à mal le traitement égalitaire.
Parmi les mesures à prendre pour les jeunes, l’éducation politique me paraît prioritaire. Il faudrait que les jeunes soient mieux informés sur leurs droits et leur pouvoir d’action, mais aussi sur les mécanismes de répartition du pouvoir politique. Moi actuellement, je recherche un travail dans une collectivité territoriale. Eh bien dans tout mon cursus, on ne m’a jamais parlé de l’articulation qui existe entre elles.
Je crois que les institutions politiques de notre pays sont capables d’apporter des solutions aux défis de l’avenir mais que cela n’est pas forcément la priorité de nos représentants politiques. Il faudrait permettre aux jeunes d’être plus actifs à l’échelle locale, dans les conseils municipaux et les communautés de communes. Parmi les personnes qui siègent, les plus jeunes ont 40 ans, après ce sont plutôt des sexagénaires et plus…
« On voudrait être actifs en politique et on n’a pas les clés pour agir. »
Moi qui habite dans le milieu rural, je ne vais pas m’impliquer à l’échelle nationale. En revanche, j’aimerais m’investir au niveau local. Je pense que nous pouvons mieux vivre avec les personnes qui viennent de s’installer. Il faudrait renouer le dialogue avec les néoruraux, et pour cela aménager des espaces le permettant. C’est toujours plus intéressant de définir les choses ensemble.
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