Après avoir plongé dans les problèmes d’insécurité des cités du nord de la ville, Emmanuel Macron poursuit jeudi sa visite à Marseille en assistant à la rentrée dans une école avant de détailler un plan d’urgence pour la ville.
Au deuxième jour de sa visite dans la cité phocéenne, le chef de l’État va retourner dans les quartiers nord, les plus populaires de la ville.
Il sera accueilli à 09H30 dans une classe de CM2 de l’école Bouge, dans le 13e arrondissement, le jour de la rentrée scolaire avec le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer et le maire socialiste Benoît Payan.
Il fera le point sur le protocole sanitaire mis en place pour cette deuxième rentrée affectée par la pandémie du Covid-19.
Plus spécifiquement, il s’entretiendra aussi avec les enseignants et des parents d’élèves sur la nécessité de rénover cette petite école de quartier, dont certains équipements, comme le gymnase, sont très dégradés, comme dans de nombreuses écoles de la ville.
Cette visite de terrain sera suivie par la présentation, dans l’après-midi au palais du Pharo, du plan « Marseille » en grand qui comprendra une série de mesures et de projets, « co-produits avec les collectivités », selon l’Élysée, pour un montant qui n’a pas été dévoilé mais devrait dépasser le milliard d’euros.
Emmanuel Macron annoncera notamment que l’État participera largement au vaste plan de rénovation, lancé par la municipalité, de plus de 200 des 472 écoles de la ville.
Préfabriqués parfois installés depuis des années ou, dans certains établissements, rats dans les salles de classe, toit qui s’effondre ou punaises de lit dans les dortoirs : « Les écoles sont indignes de la République », résume M. Payan qui évalue à 1,2 milliard d’euros les besoins de financement de la première tranche.
L’éducation est l’une des trois priorités de ce vaste plan, présenté comme « historique », pour permettre à la deuxième cité de France — près de 900 000 habitants pour la ville et de 1,6 million pour l’agglomération — de tenter de rattraper son retard.
Les deux autres sont les transports collectifs dans une ville qui ne compte que deux lignes de métro et la réhabilitation des logements insalubres près de trois ans après le drame de l’effondrement d’immeubles dans la rue d’Aubagne. Il devrait annoncer un programme pour l’hôpital de la Timone.
En campagne dans la ville
« Beaucoup de choses qu’on va lancer n’auront pas de résultats tout de suite, je suis lucide. (…) On va faire le maximum mais je ne peux pas vous dire qu’on réussira », a-t-il déclaré mercredi.
Le scepticisme est partagé par des habitants et des élus locaux qui rappellent que de nombreux plans ont été annoncés depuis des décennies pour Marseille, sans que la situation ne s’améliore nettement.
« Bien sûr que cela suscite de l’espoir. Après il ne faut pas que ce soit un « one-shot » », a réagi le maire concédant que « tout ne sera pas fait en six mois, pas en un an ».
« On va vous voir aujourd’hui et après on va plus vous revoir, c’est pour cela qu’on vous demande de faire quelque chose pour les cités de Marseille », a lancé Bilal, un éboueur de 32 ans dans la cité populaire de Bassens.
« Il est nécessaire que nous ayons des résultats » pour que « nos habitants voient véritablement qu’il y a une différence », a reconnu de son côté la présidente LR de la métropole, Martine Vassal.
Créée en 2016, la métropole Aix-Marseille-Provence n’a pas permis de tirer le territoire vers le haut et de régler le problème de la misère endémique de la deuxième ville de France.
Jean-Luc Mélenchon (LFI), présent comme député à une réunion avec les élus locaux, a dénoncé « le pèlerinage des promesses » du président, qui « est en campagne électorale », en pariant que « pas un euro de ces promesses ne sera dépensé avant l’élection ».
« Je ne veux pas égrener des milliards »
À huit mois de la présidentielle, ce déplacement est largement commenté sur la scène politique nationale, l’opposition de droite concentrant ses critiques sur le bilan sécuritaire d’Emmanuel Macron à Marseille, et au delà au niveau national, tandis que la gauche demande que l’État mette plus de moyens dans les services sociaux.
Les annonces concernant le renforcement de la politique sécuritaire restent le canal de communication privilégié d’Emmanuel Macron qui les distille avec une délectation particulière dans les villes dirigées par des maires socialistes. En termes de moyens, ce sont aussi celles qui se concrétisent le plus rapidement. Le président a annoncé une accélération de l’arrivée à Marseille des 300 policiers de plus promis par le ministère de l’Intérieur, qui seront tous là en 2022 et non plus 2023.
L’Élysée prévoit la création d’un nouvel hôtel de police dans les quartiers nord pour un coût sans le terrain de 110 millions d’euros, dévoile le Canard enchaîné dans son édition du 1er septembre. Un projet qui représente à lui seul 70 % des sommes dépensées chaque année dans le pays pour rénover ou construire de nouveaux commissariats.
« Il faut que tout le monde comprenne dans notre pays que les consommateurs de drogue sont des complices » [des trafiquants], a dénoncé hier Emmanuel Macron devant des policiers réunis dans un commissariat du 14e arrondissement de Marseille. « Nous savons le cancer qui ronge la ville, comme d’autres villes. C’est la drogue », a martelé le président de la République, reconnaissant que « ce n’est pas propre uniquement à Marseille ».
Dans une interview exclusive accordée à France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur, soucieux de respecter les susceptibilités locales, le président s’est montré attentif mais beaucoup moins précis sur les engagements concrets en matière sociale « Pour la 2e ville de France, qui a des problématiques très particulières et est l’une des plus pauvres, il faut inventer des solutions nouvelles », a-t-il déclaré. « Je ne veux pas égrener des milliards, ça a déjà été fait beaucoup de fois (…) Il y a des réponses d’urgence : la sécurité, l’école, le logement. (…) Mais au-delà de toutes ces réponses d’urgence, il y a aussi l’idée d’avoir des grands projets », a-t-il ajouté.
Après un dîner jeudi avec le chef du gouvernement italien Mario Draghi, Emmanuel Macron consacrera la journée de vendredi à l’environnement, avec une sortie en mer dans le Parc national des Calanques et l’ouverture du Congrès mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui se tient à Marseille jusqu’au 11 septembre.
Avec AFP