Un collectif d’habitant.e.s du quartier Fontaine-Lestang à Toulouse sème des graines sur une parcelle abandonnée que la mairie entend récupérer pour construire des logements sociaux, rue de Caen. En attendant le démarrage des travaux, ils et elles jardinent, se rencontrent et échangent.
Même le vent d’Autan qui souffle à plus de 90 kilomètres heure, en ce dimanche toulousain, n’arrive pas à les déraciner. Ils et elles cultivent leur jardin-cité, n’en déplaise à la municipalité qui veut clôturer l’espace vert. Les bras s’élèvent avec au bout des bêches pour planter sur un bout de terre des pommiers et l’arbre à kaki, le plaqueminier. En face, choux, fèves et brocolis se dandinent au gré des rafales.
La Biscotte, le collectif des habitant.e.s du quartier Fontaine-Lestang travaille la terre et le lien depuis une sale année de « finementcon ». Cet après-midi, c’est la « Faites du troc et du don ». Sur l’herbe, pêle-mêle on trouve des vêtements, sur une table ronde des bijoux, un kayak prêt à prendre l’eau, des disques de variétés, de vieux ustensiles de cuisine — on dit plutôt vintage pour être à la page et des auteurs-compositeurs-interprètes. On joue par terre comme de grands enfants, car au pays des utopies concrètes tout est permis.
En attendant les logements sociaux, cultivons notre jardin.
Hugo, qui vit dans le coin depuis 2 ans, raconte comment tout a commencé : « Ce projet de jardin partagé est né spontanément de l’envie des voisin.e.s de pouvoir jardiner. On a donc trouvé cette friche. » Ce terrain abandonné depuis plus de 10 ans appartient à Toulouse Métropole Habitat (TMH), bailleur social, donc à la ville… qui a prévu de construire des logements sociaux, mais quand ? Aucune date sûre n’est fixée, aucun permis de construire n’a été déposé à ce jour, selon les participant.e.s à cette assemblée festive. Les riverain.ne.s ne s’opposent pas à ces habitations mais souhaitent continuer à cultiver la terre nourricière en lien avec les enfants et les personnels de l’école d’à côté, Étienne-Billières.
La réponse de l’équipe municipale de M. Moudenc a été de commencer à clôturer la parcelle. Des piquets ont été plantés et une porte dressée, déjà fermée à clé. C’est fou comme la municipalité de droite aime bétonner et grillager les espaces verts ouverts aux citoyens et citoyennes qui prennent le chemin du collectif et du faire ensemble, en ces temps de mesures prises d’en haut incitant au repli sur soi et à l’individualisme.
À la recherche d’un local solidaire et inclusif
Le triporteur invite au café, bissop, chaï et à se régaler avec tarte au citron, biscuits à gogo et fondant au chocolat. Tiphaine, du collectif le Boui-Boui, est tombée sans se faire mal tellement elle a dû ramer pour pédaler contre vents et marées. Elle n’habite pas le quartier mais a travaillé non loin, aux Arènes, dans la plate-forme accueillant les migrant.e.s. « Il manque des lieux de convivialité pour se retrouver. On recherche un local pour accueillir des activités solidaires et inclusives. » Tiphaine pense qu’il faut partir des besoins des gens et de leurs envies.
Le triporteur, c’est la préfiguration du café sans murs, qui s’installe chaque jeudi de 16h à 18h à la sortie du métro Fontaine-Lestang. « Au-delà de la rencontre, ça peut être un pas franchi pour faire partie du collectif », soutient Tiphaine.
Sans attendre d’être enfermés, ils et elles se battent pétitions en main et présence physique pour empêcher les pelleteuses de terrasser le végétal et le vivant.
Piedad Belmonte