« Je compte sur vous », a répété à plusieurs reprises le chef de l’État, lors de son allocution en direct à la télévision « La priorité des priorités est de protéger les plus faibles et de freiner l’épidémie », a-t-il dit.
Mais aux dernières nouvelles et pendant l’épidémie, l’entreprise de démontage du système social français continue de plus belle et pour les « derniers de cordée » il n’y a pas d’allégement, pas de répit et pas de remise.
Les statistiques sont sans appel : les enseignants, les infirmiers et les sapeurs-pompiers français sont parmi les moins bien payés d’Europe. ‘A cela il faut ajouter des conditions de travail qui, d’année en année, vont se dégradant. Il est paradoxal que tous ces métiers qui requièrent si non une vocation tout au moins un dévouement, ces métiers qui prennent soin de l’autre, tous ces emplois sans lesquels la société ne serait pas solidaire, voire tout simplement ne serait pas, sont les plus déconsidérés en ce beau pays. On a la sensation que leur rémunération et leur valeur a diminuée à mesure que les problèmes se multipliaient et se multiplient. Drôle de contradiction, bizarrerie de la modernité que ce mépris à l’égard de ceux qui nous éduquent, nous soignent et sauvent. Les signes d’une dégradation du vivre ensemble se multiplient et ils sont les mêmes dans toutes les sociétés occidentales mais il y a des différences et de taille. La différence est avant tout quantitative : passez les Alpes, les Pyrénées ou le Rhin et, certes, vous aurez les mêmes symptômes mais pas dans les mêmes proportions.
La quantité, moindre ou accrue, d’un phénomène dans une société est la ligne qui sépare un malaise social des problèmes graves qui sont désormais endémiques en France : le rapport aux autres et la capacité de « faire collectivité ». Les valeurs qui devraient être partagées sont accaparées par les individus et chacun érige son bon droit sous la bannière des susdites valeurs qui, du coup, justifient toute sorte de narcissisme et de surdité sociale. Il est évident, aussi, au vu des derniers choix budgétaires, que notre président a tranché pour une stigmatisation et un abandon des « derniers de cordé » en les pénalisant économiquement et donc socialement. Or ce sont aussi et en particulier, ces derniers avec lesquels ont à faire les enseignants, les infirmiers et les pompiers. C’est cette classe des laissés pour compte, elle-même morcelé, qui les trouve en première ligne dans leur quotidien toujours plus difficile. Chez eux ça ne ruisselle pas mais ils colmatent les brèches toujours plus nombreuses qui lézardent le corps social.
D’autre part, en ce moment de panique économique, on peut remarquer que les justes requêtes des PME et TPE ont trouvé, en principe, la disponibilité et l’appui du gouvernement : un délai pour aménager les payements, une réduction ou abolition momentanée de la TVA, un allègement des charges…en somme le monde de l’entreprise est sur le pont et demande une aide aux collectivités et à la collectivité.En même temps l’entrée en vigueur au premier avril des nouvelles règles qui durcissent l’accès au chômage et un savant calcul d’apothicaire économique qui baissera les allocations, vont précipiter des milliers de familles dans l’indigence la plus noire, de surcroit faisant sortir ces personnes des statistiques et, du coup, faire baisser automatiquement le chômage . D’autre part dans le nouveau projet de retraite les demandeurs d’emploi non indemnisés ne pourront pas créer des nouveaux droits à la retraite…une sorte de double peine en somme.
Aux dernières nouvelles en somme et pendant l’épidémie, l’entreprise de démontage du système social français continue de plus belle et pour les « derniers de cordée » il n’y a pas d’allégement, pas de répit et pas de remise. Il faut payer dare-dare et sans délai. Les syndicats réclament une pause pendant l’épidémie : seront-ils entendus autant que les entreprises ? Malheureusement poser certaines questions est déjà y répondre.
Gianni Angelini
Image Art Against Poverty. EZK Street Art