Bien sûr le vieil adage dit que la nuit porte conseil mais souvent c’est pendant des nuits blanches que l’on prend les décisions fermes, diverses et variées, c’est grâce aux nuits blanches qu’on en voit de toutes les couleurs…Ainsi Mattia Santoni, Roberto Morotti, Giulia Trappoloni, et Andrea Garreffa se faisaient du mouron par une nuit d’hiver à Bologne en pensant que Salvini viendrait soutenir sa candidate au fauteuil de président de la région, Lucia Borgonzoni.
La rouge Bologne, cœur battant de la rouge Emilie-Romagne , l’ancien laboratoire de « l’eurocommunisme » qu’aujourd’hui on ne cite que dans les livres d’histoire, risquait de tomber dans l’escarcelle de la Ligue Nord. Le rendez-vous de la Ligue devait avoir lieu le 14 novembre au « Paladozza » structure que peut contenir au maximum 5 570 personnes d’où l’idée d’organiser un meeting avec au moins 6000 personnes, tous ensemble et serrés comme des sardines en boîte (de conserve…).
Serrés et en silence pour défier les vociférations de la rhétorique de la Ligue. La consigne « pas de partis, pas de drapeaux, pas d’insultes, fais toi-même ta sardine pour participer à la première révolution piscicole de l’histoire » Voilà l’appel ironique qui était diffusé via Facebook. Les organisateurs donnaient rendez-vous aux habitants de Bologne sur le « crescentone » le mythique parvis de Piazza Maggiore, lieu emblématique de tous les raouts politiques et festifs.
Au final ils étaient 15 000 au rendez-vous des poissonniers, avec des sardines en cartons, colorées, bariolées comme un risible et moqueur blason contre la droite et la bêtise populiste. Ensuite les sardines de Bologne on fait des petits et le mouvement a essaimé dans toute l’Italie. Mais « Kezaco » ce drôle de mouvement ? Génétiquement « Les Sardines » c’est bel et bien un mouvement de gauche au sens large.
Cette fantomatique « société civile » invoquée, et évoquée par tous les politiciens qui ne savent plus où donner de la tête, n’en fait qu’à la sienne et ressurgit là où la politique s’absente avec une créativité toute italienne. Il faut dire qu’au vu des résultats des dernières élections régionales les sardines ont bel et bien mis en boîte le requin Salvini qui surfait sur la vague de son populisme en bras de chemise.
Stefano Bonaccini le candidat du centre-gauche a amplement gagné avec 51,6% contre la candidate de La Ligue et avec une affluence record aux urnes, preuve que la tradition de gauche de la région est encore vivante même si assez mal en point….
Certes, la Calabre est tombée dans les mains d’une coalition de centre-droit…la Calabre des « terroni » (des culs-terreux) comme La ligue Nord, appelait les Italiens du Sud a adoubé ceux qui jadis les méprisaient. Bien sûr la crise endémique, la corruption, la lassitude, le problème migratoire sont passés par là mais il faut dire aussi que les Italiens sont coutumiers des paradoxes et des byzantinismes de la politique.
C’est bien Aldo Moro qui avait défié toute la géométrie euclidienne et, en parlant d’un rapprochement avec le P.C.I., avait défini des « convergences parallèles ». La naissance du P. D. avait été qualifiée à son tour de « fusion froide », drôle de déni de la thermodynamique… alors que des calabrais votent pour. La Ligue Nord n’est que le énième signe d’une incompréhension, d’un perte de repères et, aussi, d’une juste protestation qui emprunte une mauvaise voie .
Depuis longtemps on n’avait pas vu un mouvement de telle ampleur et la rapidité de son développement signale une disponibilité à l’action et un rejet bien ancré, tout au moins dans certaines parties de l’Italie d’où la gauche pourrait entamer une reconstruction si toutefois elle le désire vraiment.
Pour l’instant le squale Salvini s’est cassé les dents…la sardane des sardines n’est pas prête de s’arrêter.
Gianni Angelini
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