Trois soirées. Une ville. Un souffle. Le Théâtre de la Mer a retrouvé ses enfants. Trois festivals portés par des acteurs locaux qui, chacun à leur manière, ont célébré l’énergie créative du territoire et la vitalité de sa scène musicale. Rock indé, punk, chanson noire, électro, polyphonies méditerranéennes… La diversité était à l’honneur dans ce triptyque de clôture, avec un dénominateur commun : Sète, cœur battant de la création.


 

À Sète, quand il n’y en a plus il y en a encore. Alors que la saison estivale touche à sa fin, le Théâtre de la Mer a offert aux Sétois trois soirées exceptionnelles du 11 au 13 septembre, prolongeant l’été en beauté et en musique. La première soirée a marqué les esprits avec le « Chichois Fest », porté par le duo sétois Jérémie et Grégory, de Chichois Production. Bien connus pour leurs bourses aux vinyles, ils ont cette fois investi le mythique Théâtre de la Mer pour une première édition audacieuse et résolument alternative. « C’est un projet qui nous tient vraiment à cœur », confiait Grégory. « Et c’est surtout un honneur pour nous de faire une soirée dans le Théâtre de la Mer. Chaque fois qu’on passe devant, on se dit : c’est notre scène à nous. » Un clin d’œil affectueux à cette scène emblématique que tout musicien rêve de fouler. Et pour une première, le Chichois Fest n’a pas fait les choses à moitié : Washdown, Paradis Minuit, Sugar & Tiger et Le Peuple de l’Herbe ont enchaîné les performances, avec une énergie brute et un accent fort mis sur les femmes à l’avant de la scène. « On est en 2025,more women on the stage” », rappelle Grégory. « Les vieux rockeurs sont derrière, les femmes devant ! » Une déclaration aussi musicale que militante.

La soirée suivante, orchestrée par l’association Les Rabageois et présentée par Guy Lamour, a plongé le public dans l’univers du rock sétois. Le festival « Là ! Sétois ! » a mis en lumière des groupes emblématiques de la scène locale : The Sonic Preachers, LGF (Little Green Fairy), Bill Condor, Son of a Gun, dans une ambiance chaleureuse et fédératrice. Entre concerts, animations vinyles, expositions et restauration sur la terrasse, l’esprit de camaraderie et de partage régnait en maître. Une soirée « faite maison », qui a souligné toute la richesse du vivier musical de la ville, entre héritage et renouveau.

Apothéose de ce triptyque musical, la soirée Sète « All Stars » a réuni une constellation d’artistes issus de la scène régionale et internationale : Walid Ben Selim, Pascal Contet, Ihab Radwan, Imbert Imbert, Brice Kapel, La Criée, Sista Saf Feh, Djé Balèti, Patrice Héral, Pascal Corriu, Joan Eche-Puig. Une soirée unique, mêlant improvisation, poésie sonore, traditions méditerranéennes et créations spontanées. Une véritable fresque vivante où, comme le dit Ihab Radwan, directeur artistique de la soirée : « On est très concernés par la double culture ; renverser les valeurs pour aller voir en dessous. Une culture occitane qui voit les choses horizontalement, avec imagination. On aime tous faire la fête et on est touché par les mots et la musique de l’autre. »

Un théâtre réapproprié par ses artistes et ses habitants

Au-delà des concerts, ces trois soirées ont symbolisé une réappropriation du Théâtre de la Mer par les Sétois eux-mêmes, comme l’a souligné le nouveau maire de Sète, Hervé Marquès : « C’est un plaisir de terminer la saison avec le vivier artistique sétois. Le Théâtre de la Mer est ouvert sur le monde. Quand vous posez vos bagages à Sète, vous êtes Sétois. » Cette vision d’une “sétorité” ouverte et créative, fondée sur le partage et l’envie de jouer ensemble, a guidé ces rendez-vous. Un théâtre qui joue les prolongations, habituellement fermé à cette période, pour offrir aux artistes le bonheur de jouer chez eux, et aux Sétois le plaisir de redécouvrir leur scène comme un joyau vivant.

Au vu du succès populaire et artistique de cette trilogie musicale, une chose est sûre : cette initiative mérite d’être reconduite. Car la star, comme l’a rappelé plus d’un artiste pendant ces trois jours, « c’est le Théâtre de la Mer, la plus belle scène de la Méditerranée. » Et quoi de plus naturel que les artistes du cru y soient les derniers à faire vibrer ses pierres… avant de mieux revenir l’année prochaine…

Jean-Marie Dinh

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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.