La 26e édition de ce grand rendez-vous des musiques du monde se tiendra du 12 au 18 juillet. Au programme : Flavia Coelho, Souad Massi, Piers Faccini, Goran Bregovic, une rencontre sur la Palestine proposée par Médiapart et une foule d’autres événements organisés dans les lieux les plus emblématiques de la ville.
7 jours, 150 artistes, 60 concerts et rencontres musicales dont bon nombre sont gratuits : du Théâtre antique aux Alyscamps, du Museon arlaten rénové à la Place Voltaire, de l’Espace Van Gogh à la Camargue, le (vaste) territoire d’Arles va vivre au rythme des musiques du monde. Comme un immense souffle, une parenthèse dans un monde en proie aux pires conflits identitaires. Au fil des ans, Les Suds et leurs invitations à la découverte sont devenus un des festivals majeurs de l’été dans une région bien pourvue en ce domaine.
« Cultiver ensemble l’altérité et ses bonheurs »
Une quarantaine de stages et de master classes (cante flamenco, oud, danse…) qui ont déjà recueilli plus de 400 inscriptions — « la moitié ne sont pas de la région proche », précise Stéphane Krasniewsi, directeur des Suds —, des siestes musicales, « comme un temps suspendu qu’il nous faut conserver », organisées en partenariat avec la maison d’édition Actes Sud, une rencontre intitulée La Palestine au cœur avec Edwy Plenel et Elias Sanbar, ambassadeur de la Palestine à l’Unesco et traducteur de l’œuvre de Mahmoud Darwich en français, des croisements musicaux multiples à l’image du concert qui réunira le Sicilien Maura Guerrera, le Provençal Manu Théron et l’Algérien Malik Ziad… : la philosophie des Suds à Arles, c’est « cultiver ensemble l’altérité et ses bonheurs », résume sa présidente fondatrice, Marie-José Justamond. On l’aura compris, ce n’est pas seulement une question de notes de musique : « Dans une région particulièrement menacée par les idées xénophobes, nous croyons que la découverte des autres participe à un vivre ensemble harmonieux », souligne-t-elle.
Les Suds sont une invitation à dépasser les frontières, et d’abord celles qui se trouvent dans nos têtes. Et il n’y a probablement pas de trait d’union plus efficace que la musique pour cela. Le métissage que certains ne veulent pas voir y est une réalité depuis des décennies : sur les scènes arlésiennes, Murman Tsuladze (Géorgie-Espagne-France) mêlera musique caucasienne, Electro et New Wave, la jeune formation Ladaniva conjuguera l’Arménie et la France, le groupe féminin Atine et ses appartenances diverses (Iran, France, Palestine) fera revivre la musique classique persane, le duo franco-maroco-cubain formé de la chanteuse Oum et du saxophoniste et claviériste Carlos Mejias, comme le chanteur Gael Faye qui entremêle Rap, Beat Electro et Rythmes Afro exploseront les codes. Oum, M-Carlos et Gaël Faye seront au Théâtre antique le samedi 17 juillet pour une soirée en soutien à SOS Méditerranée.
« Une brèche dans le temps et dans l’espace »
Dans ce festival qui essaime au-delà de la seule ville d’Arles, le château de Tarascon accueillera une rencontre inédite, nommée Contretemps, entre le grand historien Patrick Boucheron et les musiciens de la Compagnie Rassegna. Tout ceci « paraissait improbable il y a encore quelques mois », relève Marie-José Justamond. « Bien sûr, nous avons du adapter les espaces, modifier les horaires, nous avons élaboré mille scénarios pour conserver l’esprit du festival, sa convivialité, mais l’essentiel est là, dans cette brèche que nous ouvrirons dans le temps et dans l’espace pour nous retrouver, nous émouvoir, pour rêver », souligne Stéphane Krasniewski. « Nous retrouver » est devenu le maître mot de la période et des festivals de cet été, après celui de 2020, bien maigre en matière de réjouissances.
Des chants d’Italie du Sud de Pino De Vittorio au Raï sicilien de Crimi, du chant de Sahra Halgan, militante féministe du Somaliland, à Dafné Kritharas dont l’expression marie le grec, l’arménien, le turc, le ladino ou le serbo-croate (le 18 juillet au Domaine de la Palissade, en Camargue), 1les Suds sont comme l’antidote à un paysage musical désespérément plat qui voient se succéder… toujours les mêmes sur les chaînes de télé. On ne citera pas de nom car aucun travail artistique ne mérite l’opprobre. Mais quand Stéphane Krasniewski parle de « retour à la vie », on ne peut que le croire. Sur les bords du Rhône, l’humanité respirera mieux du 12 au 18 juillet.
J-F Arnichand
(Photo Florent Gardin)