Presstalis devient France Messagerie et liquide ses filiales en régions. Mais après la table ronde tenue le jeudi 9 juillet en Préfecture des Bouches-du-Rhône, la lumière est peut-être au bout du tunnel pour les salariés de la Société d’agence et de diffusion basée à Marseille… les marchands de journaux et les lecteurs.
Actions diverses de la CGT, à la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles), d’Aix-en-Provence, devant la permanence de Martine Vassal ou dans (l’immense) zone commerciale de Plan de Campagne, (entre Marseille et Aix) alertes de députés des Bouches-du-Rhône comme Pierre Dharréville (PCF) ou Monica Michel (LREM), députée d’Arles : le sort de Presstalis et de sa filiale marseillaise SAD suscite bien des inquiétudes depuis plusieurs mois.
Placée en redressement judiciaire le 15 mai, la société Presstalis est le premier distributeur de presse du pays. Ce jour là, le Tribunal de commerce a également prononcé la liquidation des filiales SAD en régions, menace directe sur l’emploi de 512 salariés. Après la période de confinement qui avait déjà obligé les journaux à réduire leur pagination et à revoir leurs méthodes de travail, cette situation affecte gravement le secteur de la presse.
Depuis plusieurs semaines, les présentoirs sont désespérément vides dans les kiosques et autres maisons de la presse des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse et d’une partie du Var (le département de l’Hérault, livré par un autre distributeur, échappe à la pénurie), privant les lecteurs potentiels d’accès aux quotidiens nationaux mais aussi à la presse magazine dont on connaît la variété en France (sports, musiques, découvertes, etc.).
C’est une atteinte supplémentaire au pluralisme, dans la mesure où les quotidiens offrent une certaine diversité d’opinions que l’on retrouve rarement sur les chaînes de télévision, privées ou publiques… où sévissent régulièrement les mêmes représentant-e-s du Figaro, de Challenges et autres Causeur ou Valeurs actuelles. En crise depuis des décennies, la « presse papier » se trouve là privée de visibilité : tout le monde n’a pas le réflexe ou la volonté d’opter pour un abonnement numérique.
En mai, la Coopérative de distribution des quotidiens et des titres comme Les Échos, Le Figaro ou l’Équipe ont proposé de reprendre seulement 265 des 910 salariés de Presstalis. Aucun des dépositaires en régions ne serait repris 1. Selon le quotidien Le Monde, « l’idée serait de continuer à diminuer le nombre de dépôts sur le territoire : ils étaient moins de 700 en 1995, 61 début 2019 ». Les zones de distribution seraient réattribuées « à des dépositaires indépendants ou des nouveaux entrants », indiquait le président de Presstalis, Cédric Dugardin. À charge pour ces « nouveaux entrants » de privilégier la reprise des anciens salariés.
Le Ministre de la Culture interpellé
Depuis plusieurs semaines, les interventions d’élu-e-s adressées à l’ex ministre de la Culture (Franck Riester à l’époque) n’ont pas manqué. La députée arlésienne Monica Michel considère que « face aux conséquences sociales et économiques que provoque cette situation, notamment pour les revendeurs de presse, il est important de sortir de l’impasse ». En avril, un autre député des Bouches-du-Rhône, Pierre Dharréville, jugeait déjà, dans un courrier adressé au même ministre, que « cette situation résulte d’une volonté de certains propriétaires de presse de ne plus partager ce service mutualisé de distribution permettant de garantir le pluralisme ». Pour le député PCF, « elle procède également d’une volonté manifeste de dumping social ».
La SAD (Société d’agence et de diffusion) qui possède des dépôts à Lyon et à Marseille notamment, était déjà en difficulté avant le confinement, en raison de la baisse des ventes des quotidiens : « En manque de canards, Presstalis perd des plumes» titrait en février Libération qui ne résistait pas à la tentation du jeu de mots. Et si les maisons de la presse et les kiosques considérés comme des activités essentielles sont restés ouverts durant la période de confinement, la crise sanitaire a eu un impact sur les tirages. Aujourd’hui, les difficultés demeurent après le déconfinement pour ce secteur déjà fragile.
À Marseille, la SAD liquidée c’est 134 emplois supprimés. Depuis l’annonce de la liquidation, le syndicat CGT multiplie les actions et a fait savoir sa volonté de pérenniser l’activité. Une table ronde tenue le jeudi 9 juillet à la Préfecture des Bouches-du-Rhône a permis aux salariés d’entrevoir l’avenir avec une certaine confiance. 84 d’entre eux souhaitent poursuivre leur activité dans la presse2 et la reprise sous forme de S.C.I.C (Société coopérative d’intérêt collectif ) est envisagée. Quand on vous disait que les coopératives c’est l’avenir…
Et ce n’est pas tous les jours que la présidente du Conseil départemental 13, Martine Vassal (LR) soutient un projet porté par les salariés. Le périmètre de la société s’étendrait jusqu’à l’Est du Var (Fréjus) là ou les messageries souhaiteraient s’arrêter à Toulon.
Morgan G.