La décision du Mucem de mettre fin à son partenariat avec Digital Realty, au cœur d’une controverse liée à la colonisation israélienne, révèle les tensions croissantes entre éthique culturelle, pressions politiques et stratégies d’influence des grandes multinationales.


 

À l’origine de la polémique, un partenariat de mécénat noué depuis dix ans entre le Mucem et Digital Realty, géant américain des data centers, propriétaire de plusieurs infrastructures à Marseille. L’entreprise est mise en cause pour sa participation à une coentreprise avec la société israélienne Mivne Real Estate (MVNE), accusée par de nombreuses ONG et instances internationales d’être impliquée dans des projets immobiliers liés à la colonisation de territoires palestiniens, notamment en Cisjordanie. Cette situation a suscité une mobilisation croissante de collectifs citoyens, d’artistes, de chercheurs et de défenseurs du droit international, interpellant le musée sur la cohérence entre ses valeurs et ses partenaires économiques.

En choisissant de ne pas renouveler cette convention, le Mucem affirme une position éthique rare dans un paysage culturel de plus en plus exposé aux stratégies d’image de multinationales en quête de respectabilité. Cette décision raisonnée et courageuse intervient dans un contexte où les institutions culturelles deviennent des cibles privilégiées de campagnes de communication visant à blanchir des activités controversées par le biais du mécénat.

Contrairement aux accusations portées par certains responsables politiques locaux, cette mobilisation ne peut être réduite à l’action d’un supposé « collectif d’extrême gauche ». Elle s’inscrit dans une expression large de la société civile, relayée par des artistes, des universitaires et des organisations internationales, dont les positions ne sauraient être assimilées à de l’antisémitisme sans alimenter des amalgames dangereux.

La réaction de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur et du Département des Bouches-du-Rhône, menaçant de suspendre leur coopération et leurs subventions — au demeurant marginales dans le budget du musée — relève avant tout d’une mauvaise communication politique. En privilégiant l’indépendance éthique au détriment de la complaisance, le Mucem rappelle que la culture n’a pas vocation à servir de paravent, mais à nourrir l’esprit critique et le débat démocratique.

 

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Après des études de lettres modernes, l’auteur a commencé ses activités professionnelles dans un institut de sondage parisien et s’est tourné rapidement vers la presse écrite : journaliste au Nouveau Méridional il a collaboré avec plusieurs journaux dont le quotidien La Marseillaise. Il a dirigé l’édition de différentes revues et a collaboré à l’écriture de réalisations audiovisuelles. Ancien Directeur de La Maison de l’Asie à Montpellier et très attentif à l’écoute du monde, il a participé à de nombreux programmes interculturels et pédagogiques notamment à Pékin. Il est l’auteur d’un dossier sur la cité impériale de Hué pour l’UNESCO ainsi que d’une étude sur l’enseignement supérieur au Vietnam. Il travaille actuellement au lancement du média citoyen interrégional altermidi.