Voilà qui n’a pas dû flatter la ministre de la Culture… mais plutôt réveillé son volcan intérieur. Le 19 novembre dernier, en pleine séance de questions au gouvernement, Rachida Dati a exprimé son vif mécontentement après que France Télévisions et Radio France ont assigné CNews, Europe 1 et Le JDD devant le tribunal de commerce de Paris.
« Cette démarche n’avait en aucun cas été concertée et encore moins approuvée par les tutelles », a-t-elle déclaré, estimant que le ministère de la Culture « aurait dû être informé », tout en reconnaissant qu’« en l’état du droit, c’est leur liberté d’avoir choisi de s’engager dans cette voie ».
Attaqués violemment depuis plusieurs mois par les médias du groupe Bolloré, les deux groupes publics ont décidé de riposter, cette fois sur le terrain judiciaire. Les deux groupes publics ont en effet assigné CNews, Europe 1 et Le JDD pour « dénigrement » devant le tribunal de commerce de Paris, une plainte déposée la semaine dernière, selon une information révélée par Le Figaro et confirmée par Télérama.
La situation s’était envenimée depuis la rentrée avec la publication par le média d’extrême droite L’Incorrect d’une vidéo de Thomas Legrand, éditorialiste à Libération et producteur à France Inter, et Patrick Cohen, éditorialiste pour France 5 et France Inter, filmés à leur insu alors qu’ils déjeunaient avec des dirigeants du Parti socialiste, ce qui a conduit à la suspension du premier.
Dans cette vidéo tronquée et remontée, on entend le premier dire : « Nous, on fait ce qu’il faut pour Dati, Patrick Cohen et moi », c’est-à-dire contre elle dans sa course à la Mairie de Paris pour les élections municipales de mars 2026, à laquelle elle est candidate pour Les Républicains (LR).
Celle qui multiplie les charges contre le service public, que ce soit face à Patrick Cohen dans C à vous, sur France 5, ou comme invitée de la matinale de France Inter, avait aussitôt dénoncé « des propos graves et contraires à la déontologie qui peuvent exposer à des sanctions. Chacun doit désormais prendre ses responsabilités ». Dans les jours suivants, les antennes appartenant au milliardaire d’extrême droite avaient fait leurs choux gras de ces images, accordant une très grande partie de leurs programmes aux critiques et attaques contre les deux journalistes, et contre le service public de l’audiovisuel en général, rappelle Le Monde.
Dans une lettre envoyée à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), les présidentes des deux groupes publics, Delphine Ernotte-Cunci et Sibyle Veil, avaient alors déjà dénoncé une « campagne de dénigrement systématique et quotidienne par un autre groupe de médias ». « Le caractère outrancier et déséquilibré de cette campagne dépasse désormais le simple débat d’opinion : il contribue à miner la confiance dans l’information de service public, à relativiser la responsabilité de l’acte d’informer — qui suppose honnêteté et rigueur — et, ce faisant, à fragiliser la qualité du débat démocratique », avaient alors insisté les deux dirigeantes. Elles ont donc décidé de porter la question devant les tribunaux, même si, elles ont agi séparément.
Selon le figaro, une première audience est prévue le 29 janvier prochain. S’étant procuré les assignations en justice, le quotidien révèle également que les deux groupes de l’audiovisuel public demandent 1,5 millions d’euros pour dommages et intérêts, dont 1 million côté France Télévisions et 500 000 pour Radio France.
France Télévisions mentionne dans sa plainte de plus de 80 pages «une campagne coordonnée de dénigrement particulièrement virulente, menée de manière structurée et persistante» et «visant à déstabiliser économiquement et institutionnellement le groupe public, en portant atteinte à sa réputation et à la confiance du public».
Radio France, quant à elle, fustige dans une assignation d’une soixantaine de pages une «entreprise orchestrée de déstabilisation», conduite à coups de «de propos dénigrants systématiques et répétitifs» contre elle, «visant à saper la confiance de ses auditeurs en mettant notamment publiquement en doute le respect par Radio France de principes essentiels de sa mission de service public : la neutralité, l’indépendance et le pluralisme de l’information».
Lire aussi : CNews est « une chaîne d’extrême droite » accuse Delphine Ernotte Cunci –







