DERNIERS JOURS : EXPOSITION « S.T » (SANS TITRE) A LA SALLE DES CONSULS DU PALAIS DES ARCHEVÊQUES – NARBONNE JUSQU’AU DIMANCHE 3 NOVEMBRE 2019
Leon Diaz Ronda est un « jeune » peintre né à Madrid en 1936 (un marqueur fort de l’histoire espagnole.) Cet artiste peint comme un poisson de haute mer plongeant dans les vivaces profondeurs. Il y a obscurité et lumière dans cette peinture sur laquelle plane une mystérieuse poésie.
Dans une pensée navigante au grand souffle, on peut voir et entendre beaucoup. Le large spectre, la vaste caisse de résonance président à l’œuvre doublée d’un questionnement. Le regard est titillé, tiré vers un centre : l’humain, ravivant ce qui tendait à s’assoupir…
N’est-ce pas la fonction de l’art de piquer au vif, d’émouvoir (au sens littéral de mettre en mouvement)?
Leon Diaz- Ronda porte une lumière, projetée tant sur l’état des lieux, la condition humaine et plus poussée encore sur une crise d’identité, de spiritualité. Il approuve le terme de métaphysique qui mène dans son visuel (même plus virtuel) paroxysme à une forme d’effacement du sujet. Une porte symbolique ouvre sur un éblouissement puis sur une sorte de défilé lumineux traversé d’une clarté qui tombe en à-pic sur de grisâtres petits humains; lesquels tentent on ne sait trop quel passage. Une grande partie de l’œuvre est chargée de personnages parfois inscrits dans l’isolement du cadre, parfois massés en grappe comme en protection, en défense, en attente peut-être ? Pas tout à fait assis, – qui sait, en partance ? – ils sont en proie(s)…
Il y a un terrain japonisant dans l’œuvre : un fondu de lumière dans lequel se perdent des pointes d’humain figées dans cette force électrisante. Dans des couleurs où le temps a manifestement passé, a lui aussi fait œuvre , le mouvement tremblé pourrait enclencher un basculement lorsqu’une blanche menace ( un serpent tentateur, toxique ?) surgit dans l’opacité du fond. Le trait d’ humains – cette multiplicité de points allant en file on-ne-sait-où – signe la capacité métaphysique de plonger celui qui regarde dans un interrogatif saisissement.
Se ressaisir alors dans les somptueux livres d’artiste, un retour à un savoir-faire qui lui aussi sait donner à la matière, aux couleurs, leur haut degré de créativité et de magnificence. On peut suivre l’évolution stylistique et technique de l’artiste. Rigueur de la gravure classique, richesse de précision des monotypes ainsi que dimension hybride mêlant peinture a l’huile et transfert photographique sont autant de sources d’émerveillement.
A voir absolument ces glissements, ces silhouettes taillées dans la brume, à sentir la vibration de ces couleurs qui explorent la faille sans sombrer dans la faillite !
Marijo L.
EN SAVOIR PLUS :
Léon DIAZ-RONDA, S.T 40 ans autour de l’image – À découvrir jusq’au 03/11 dans la salle des Consuls du Palais-Musée des Archevêques de Narbonne
Dans l’atelier de Leon DIAZ-RONDA, artiste.
CRITIQUE
« Dìaz-Ronda est, un créateur particulier personnel, on l’appelle : «L’artiste de la poésie et du silence. » Il arrive d’où ? Il vient de l’écriture, de la musique, du cinéma, et de la peinture. Mieux encore, de la gravure, il a passé de nombreuses années, en s’exprimant à travers les monotypes, dont le résultat était de mystérieuses cartographies du temps et de la solitude. Plus tard il découvrit le transfert de la photographie, qu’il imbrique dans sa peinture. Je pense que le meilleur de sa peinture actuelle est cet amour pour le brouillard, la brume qui montre et occulte, ou se dessine et impressionne la vie, sans tension, avec toute l’émotion et le mystère du monde. León Dìaz-Ronda (Madrid 1936), a un ample cheminement, d’expositions, d’actions et de livres d’artiste. Il est fait de ciel et de terre, comme un nuage sans décoller complètement les pieds du sol, profond sens de l’humour, de l’amitié, et de l’affection. Il ne parle pas beaucoup, sourit et jamais ne laisse voir ses souffrances, c’est comme un blues dans un club de jazz vide, néons bleus nocturnes, qui mettent en évidence la lumière de son innocence, sa solidarité affable, son regard sceptique et compréhensif. Ses œuvres lui ressemblent, soyeuses, complices, nostalgiques, humaines et éxistentialistes. Ce n’est pas un icône décoratif, mais magique, intime, « ingrimo », silencieux, et décent. »
Tomas Paredes ROMERO
Presidente de AICA Spain
L’AICA est l’Association Internationale des Critiques d’Art, créée sous l’égide de l’UNESCO