À l’Ouest de Montpellier se trouve Murviel-lès-Montpellier, un très joli petit village, sympathique, agréable où il fait bon vivre car ce n’est pas un village dortoir et la densité de population est tout à fait en accord avec le paysage.

Sa vie culturelle riche est rythmée par de nombreuses manifestations intéressantes comme « la Fête du Rat » dédiée au Théâtre, « Fiesta Fougasse », moment festif plus insubordonné, des bals de saison en lien avec les habitant.e.s et la traditionnelle fête de village, plus classique mais fort attendue également. À Murviel-lès-Monpellier beaucoup de bénévoles participent à cette vie culturelle.

Pourtant on peut se demander si ce village ne se veut pas exagérément protégé, et bien à l’abri de ce qui se passe dans le reste du monde, par exemple du génocide qui dure depuis 9 mois à Gaza, au bord de la même Méditerranée qu’ici.
En effet, au mois de mars des citoyens du village, engagés, proposent que se tienne lors d’une fête du marché dominical un stand d’information sur la situation à Gaza au côté d’autres stands citoyens.

La réponse de la mairie de Murviel-lès-Montpellier, le 13 mars, sera négative : «  Iels pensent que cela ferait trop de messages différents pour le marché ce jour là… » Cela évoque l’attitude de la mairie de Clermont-l’Hérault, très récemment, qui envoie la police pour demander à un maraîcher d’enlever le tee-shirt de soutien à La Palestine exposé dans son stand car le marché « est un lieu de consommation… »

Mais ces citoyens ne se résignent pas et demandent à rencontrer la conseillère municipale à la culture pour proposer une soirée d’information sur ce qui se passe à Gaza avec une exposition et un film documentaire Yallah Gaza. Accord est trouvé pour l’organisation de cette soirée dans un créneau libre de la salle municipale, avant l’été, le 26 juin vu la dégradation dramatique et rapide de la situation dans la bande de Gaza.

À noter que le film Yalla Gaza accompagné d’une discussion est passé dans de nombreuses villes de la région, grandes et petites, dans des salles pleines à chaque fois et sans aucun problème, au contraire : Montpellier 5 fois, Nîmes, Lodève, Sète, Béziers, Alès, Le Vigan et il y a des oublis.
Une affiche est réalisée, le lien du film est commandé au frais d’une association, l’exposition se prépare, cartes, photos et documents à l’appui… mais voilà ! L’Assemblée Nationale est dissoute.

Deux jours après nous recevons un mail, le 11 Juin : « Bonsoir, Merci pour l’affiche. Compte tenu de la proximité des dates des élections législatives, les élus souhaitent pouvoir échanger sur le maintien de la date de la soirée. Nous avons une réunion jeudi soir et je reviens vers vous pour vous faire connaître notre décision.En attendant, nous vous demandons de ne pas communiquer sur l’événement. Merci et à très vite. »
Le 13 Juin la décision adoptée lors du conseil municipal nous est donnée par téléphone, ce qui en ressort c’est le risque «  que ça dérape ! » En clair, la municipalité décide de reporter cette manifestation.

De quoi la Mairie a-t-elle peur ? La peur est-elle bonne conseillère quand on gère une municipalité ? Vivre ensemble est-ce vivre à l’abri du reste du monde et s’en protéger au moindre prétexte ? La peur est un sentiment qui se trouve du côté de la lâcheté et nous on a peur de vivre dans des villages qui se protègent du monde en pensant que tout peut déraper.

Pour conjurer les peurs, c’est un débat ouvert, un échange d’informations, entre citoyens libres et responsables, dont nous avons besoin.

Brigitte Chalande

Brigitte Challende
Brigitte Challande est au départ infirmière de secteur psychiatrique, puis psychologue clinicienne et enfin administratrice culturelle, mais surtout activiste ; tout un parcours professionnel où elle n’a cessé de s’insérer dans les fissures et les failles de l’institution pour la malmener et tenter de la transformer. Longtemps à l’hôpital de la Colombière où elle a créé l’association «  Les Murs d’ Aurelle» lieu de pratiques artistiques où plus de 200 artistes sont intervenus pendant plus de 20 ans. Puis dans des missions politiques en Cisjordanie et à Gaza en Palestine. Parallèlement elle a mis en acte sa réflexion dans des pratiques et l’écriture d’ouvrages collectifs. Plusieurs Actes de colloque questionnant l’art et la folie ( Art à bord / Personne Autre/ Autre Abord / Personne d’Art et les Rencontres de l’Expérience Sensible aux éditions du Champ Social) «  Gens de Gaza » aux éditions Riveneuve. Sa rencontre avec la presse indépendante lui a permis d’écrire pour le Poing et maintenant pour Altermidi.